Après deux ans de reprise molle, la croissance mondiale vacille sous le poids de la crise de la dette, et la zone euro, épicentre du séisme, semble même replonger dans la récession, un scénario tant redouté qui n'aura finalement pas pu être évité.

Alors que les dirigeants européens mais aussi des autres grandes puissances promettent de sommet en sommet de «tout faire» pour éviter le pire, rien n'y fait. La crise est en train de «s'intensifier», a ainsi mis en garde jeudi la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Christine Lagarde.

Les nouvelles les plus inquiétantes viennent d'Europe. Et surtout de la zone euro, où un passage, bref dans le meilleur des cas, en récession semble désormais inéluctable pour la plupart des économistes.

L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a dégainé la première, fin novembre: selon le club des pays riches, «la zone euro semble traverser une légère récession» qui se traduit par un recul du produit intérieur brut (PIB) fin 2011 et début 2012 dans ses trois premières économies, l'Allemagne, la France et l'Italie.

D'autres instituts lui ont emboîté le pas. L'Institut national de la statistique (Insee) a estimé jeudi que la France était entrée en récession au dernier trimestre de cette année, et qu'elle n'en sortirait au printemps que très péniblement.

Pour l'instant, cette récession de la zone euro s'annonce modérée. Les analystes d'Ernst and Young jugent ainsi que ce nouveau plongeon de l'économie sera «probablement moins sévère qu'en 2008-2009». La nouvelle dégradation du marché de l'emploi s'avère en revanche moins passagère, avec un taux de chômage dans la zone euro bien ancré au-dessus des 10%.

Mais ce scénario d'une crise en «W» ou en «double creux» («double-dip» en anglais), avec une récession suivie d'un début de reprise puis d'une nouvelle récession, était considéré comme improbable par la plupart des économistes il y a encore moins d'un an.

Les experts prennent donc leurs précautions et esquissent tous un scénario du pire qui verrait la zone euro engluée plus durablement dans la dépression, pour peu que la crise dégénère faute de solutions politiques crédibles.

Pour l'instant, l'économie mondiale résiste tant bien que mal, malgré un ralentissement marqué. Selon l'OCDE, la croissance de la planète freinerait à 3,4% l'an prochain après 3,8% cette année, tandis que le FMI a annoncé qu'ils abaissera «probablement» en janvier sa prévision de 4% pour 2012.

Les Etats-Unis se sont même payés le luxe d'émettre cette semaine des signaux positifs sur le front de l'emploi et de la production industrielle. Pour la Réserve fédérale, l'économie américaine poursuit donc «une expansion modérée».

Mais les États-Unis ne sont pas pour autant à l'abri, comme en témoignent les appels pressants de leurs dirigeants aux Européens pour qu'ils stoppent la propagation de leur crise de la dette.

«Il n'y a pas d'économie dans le monde, que ce soit dans les pays à bas revenus, les marchés émergents, les pays à revenus moyens ou les économies hyperavancées, qui sera immunisée de la crise», a prévenu Christine Lagarde.

Pour Ernst and Young, «les perspectives pour le Royaume-Uni et les États-Unis demeurent difficiles», mais les pays émergents ne dont pas davantage «immunisés» puisque «les exportations sont toujours un facteur majeur de leurs performances économiques».

«Leur croissance est en train de ralentir en raison des problèmes des économies avancées, même si cela ne fait que ralentir, plutôt que stopper, leur ascension vers le leadership mondial», souligne le cabinet d'audit.