La bagarre juridique entre la Fondation Fer de lance (FFL) et l'Autorité des marchés financiers (AMF), amorcée en juillet 2009 et ponctuée de multiples recours devant les tribunaux, se poursuivra devant le Bureau de décision et de révision en valeurs mobilières (BDR), malgré l'opposition des responsables de la Fondation.

Appelé à se prononcer sur une requête en suspension déposée par ces derniers, le BDR a décidé que les auditions auraient lieu comme prévu. Le Bureau a convoqué les avocats ce jeudi pour déterminer les dates de la prochaine audience.

Le BDR examinera à cette occasion la validité de l'ordonnance préliminaire de blocage des comptes de la société et d'interdiction de transactions sur les titres obligataires et l'argent détenus par la Fondation qu'il a prononcée le 17 juillet 2009. Depuis cette date, le BDR a reconduit l'ordonnance à neuf reprises, mais le débat sur le fond - entre autres pour déterminer si les placements offerts par la FFL sont soumis à la Loi sur les valeurs mobilières, comme le prétend l'AMF - n'a pas encore connu de conclusion.

Les auditions ont commencé en janvier 2010, puis ont été interrompues par une requête de la Fondation demandant à la Cour supérieure de déclarer illégale l'intervention du BDR parce qu'elle niait son droit constitutionnel à être jugé par un tribunal indépendant et impartial.

Le Procureur général du Québec s'est opposé à la requête et a obtenu gain de cause. La Fondation a ensuite tenté sans succès de convaincre la Cour d'appel du bien-fondé de ses prétentions.

La FFL est alors retournée devant le BDR à qui elle a soumis la même requête pour faire arrêter la procédure, mais le Procureur général est revenu à la charge et a remporté une autre manche, le 13 juin 2011.

La Fondation, ses responsables et un groupe de 34 investisseurs ont une nouvelle fois interpellé la Cour supérieure, lui demandant cette fois un jugement déclaratoire établissant que les investisseurs, et non la Fondation, sont les propriétaires des quelque 4 millions placés dans un compte en fidéicommis du cabinet montréalais Lapointe Rosenstein Marchand Melançon et bloqués par le BDR. Ils ont fait chou blanc.

La FFL et les investisseurs ont porté ce rejet en appel. La Fondation a échoué, mais les investisseurs ont convaincu le plus haut tribunal du Québec de retourner la question les concernant à la Cour supérieure. L'audition n'a pas encore eu lieu.

En parallèle, en juillet dernier, la Fondation a déposé un autre recours devant la Cour supérieure, toujours pour faire échec aux travaux du BDR, et a interjeté appel devant la Cour du Québec de la décision du 13 juin 2011 écartant sa thèse de l'inconstitutionnalité de la procédure instituée par le Bureau.

Joint par La Presse Affaires, Me Sébastien Richemont, l'avocat de la Fondation et de trois de ses responsables, a indiqué qu'il est possible qu'une autre requête, en sursis cette fois, soit soumise sous peu à la Cour supérieure.

«Nous sommes actuellement en discussion à ce sujet», a-t-il déclaré.

Par ailleurs, l'AMF a déposé en juillet des accusations pénales contre la Fondation et six personnes qui lui sont liées, dont l'avocat Jean-Pierre Desmarais.

L'AMF demande à la Cour du Québec de condamner les accusés à des amendes dépassant 3,7 millions et d'imposer des peines de prison de 5 ans moins un jour à Me Desmarais et Paul M. Gélinas, le trustee executor de la Fondation.

L'organisme réglementaire leur reproche entre autres d'avoir exercé illégalement l'activité de courtier et d'avoir fait la promotion de placements illégaux.

Me Desmarais a répliqué début novembre par une poursuite de 1,5 million contre l'AMF, qu'il accuse notamment de diffamation à son endroit.