La chancelière allemande Angela Merkel a répété vendredi l'importance de réformer l'Union monétaire européenne pour la transformer en une union budgétaire, afin de surmonter la crise qu'elle traverse, une bataille qui prendra des années selon elle.

«Nous ne parlons pas seulement d'une union budgétaire, nous sommes sur le point de la réaliser», a dit Mme Merkel dans un discours aux députés du Bundestag. Il s'agira d'une «union budgétaire avec des règles strictes, au moins pour la zone euro».

«Les règles doivent être respectées», a-t-elle martelé, «leur respect doit être contrôlé, leur non-respect doit être suivi d'effet».

La chancelière a répété sa ferme intention de convaincre ses partenaires de la nécessité de changer les traités européens pour y ancrer ces disciplines. Elle s'exprimait au lendemain d'un discours, à Toulon (France), du président Nicolas Sarkozy qui a plaidé dans le même sens.

Mais s'il est question d'une surveillance mutuelle des budgets et de sanctions sévères pour les pays ne respectant pas les règles, chacun continuera à contrôler ses propres dépenses et recettes, a prévenu plus tard la dirigeante allemande, lors d'une rencontre avec son homologue autrichien Werner Faymann.

Une européanisation de celles-ci «n'est pas l'objet des discussions que nous menons en ce moment», selon elle.

Avec cette précision, la chancelière renvoie aux calendes grecques l'idée d'«euro-obligations», parce que c'est précisément un contrôle mutuel des dépenses et des recettes qu'elle pose comme condition à la création de tels titres de dettes communs.

Et si la souveraineté budgétaire est préservée, elle ne voit pas de raison d'interroger les Allemands par référendum sur les changements prévus, pas plus que M. Faymann ses compatriotes autrichiens, ont précisé les deux dirigeants.

C'est donc une discipline renforcée et plus de pouvoirs d'intervention pour les institutions européennes en cas de dérapage que Mme Merkel ira défendre au sommet de Bruxelles en fin de semaine prochaine.

Avant cela, elle se rendra à Paris lundi pour préparer des propositions avec le président français Nicolas Sarkozy qui a lui aussi promis «plus de discipline, plus de solidarité, (...), un véritable gouvernement économique» en Europe.

En visite vendredi dans la capitale française, le premier ministre britannique David Cameron n'a pas fermé la porte à une réforme des traités. Il a cependant mis en garde contre toute remise en cause des intérêts britanniques qui, a-t-il dit, devront être «protégés» et «renforcés».

Le sommet européen des 8 et 9 décembre est une fois de plus présenté comme «décisif» pour l'avenir de la monnaie unique.

Le secrétaire au Trésor des États-Unis, Timothy Geithner, se rendra en Europe juste avant ce sommet pour discuter des «efforts en vue de renforcer les institutions de la zone euro».

Il doit notamment rencontrer son homologue allemand Wolfgang Schäuble, le nouveau président de la Banque centrale européenne (BCE) Mario Draghi, le président Sarkozy, ainsi que Mariano Rajoy et Mario Monti, nouveaux Premiers ministres de l'Espagne et de l'Italie.

Mme Merkel l'a redit vendredi, «le grand coup», solution à tous les problèmes n'existe pas. Remédier aux causes du mal -les dérapages des finances publiques, la faible compétitivité de certains pays- «va prendre des années».

Sans compter que cela sera accompagné de fortes tensions sociales: des dizaines de milliers de personnes ont manifesté vendredi à Bruxelles pour protester contre les mesures d'austérité que va mettre en oeuvre le nouveau gouvernement.

Les marchés ont bien réagi à ce mouvement qui semble se dessiner en Europe: la Bourse de Francfort a gagné 1,35%, celle de Paris 1,12%.

Les investisseurs n'ont pas été refroidis par des déclarations en provenance de la Chine, sur laquelle beaucoup en zone euro comptent pour venir les renflouer.»Nous ne pouvons pas utiliser les réserves de change (...) pour venir au secours de pays étrangers», a déclaré la vice-ministre chinoise des Affaires étrangères, Fu Ying.

La question du rôle de la BCE dans la lutte contre la crise continue de diviser profondément Paris et Berlin.

Mme Merkel persiste dans son refus de laisser la BCE intervenir massivement pour racheter de la dette de certains pays. «C'est gravé dans les traités, le devoir (de la BCE) est d'assurer la stabilité de la monnaie», a-t-elle dit.

M. Draghi a cependant laissé entendre que son institution pourrait s'impliquer plus activement dans la résolution de la crise, si les États de la zone euro s'engageaient sur la voie d'une véritable union budgétaire.

Le Fonds monétaire international (FMI) a fait savoir vendredi qu'il pourrait recevoir d'Europe, y compris des banques centrales, des ressources supplémentaires. Celles-ci serviraient alors à soutenir les Etats les plus fragiles de la zone euro.