Les Européens ont sommé mercredi soir la Grèce de dire, lors de son référendum début décembre, si elle veut rester dans la zone euro, et ont décidé de lui couper les vivres tant qu'elle n'aura pas appliqué le plan de sauvetage de la zone euro.

«Il est clair que la question qui se trouve posée, c'est celle de l'avenir européen de la Grèce. La Grèce veut-elle rester ou non dans le zone euro ?», a déclaré devant la presse le président français Nicolas Sarkozy, au terme d'un mini-sommet de crise à Cannes avec les principaux dirigeants européens et le Fonds monétaire international (FMI), auquel le premier ministre grec Georges Papandréou avait été convoqué.

«Nous le souhaitons très vivement et nous ferons tous nos efforts pour que cela soit possible», «mais c'est au peuple grec de répondre à cette question et c'est sur cette question qu'il devrait se prononcer si un référendum devait être organisé», a ajouté le chef de l'État français, qui doit présider jeudi et vendredi un sommet du G20 parasité par la crise grecque.

C'est la première fois qu'une sortie d'un État de l'Union monétaire assortie de sa banqueroute, solution jusqu'ici totalement taboue, est aussi explicitement envisagée.

«Si le peuple grec dit qu'il ne souhaite pas» que son pays reste dans la zone euro, «nous le respecterons, mais nous n'abandonnerons pas l'euro», a assuré la chancelière allemande Angela Merkel, lors de cette conférence de presse commune avec le président français.

«Nous (y) sommes préparés», a-t-elle ajouté.

Athènes a ébranlé l'Europe ainsi que les marchés financiers en annonçant lundi, à la surprise générale, sa décision de soumettre à un référendum à hauts risques le plan européen d'allègement de la dette grecque et d'endiguement de la crise de la zone euro adopté la semaine dernière. Après leur chute libre de la veille, les places boursières et l'euro ont un peu rebondi mercredi, mais restaient sous le choc.

Georges Papandréou a confirmé que «l'enjeu» était «clairement» l'appartenance de son pays à la zone euro. Il n'a toutefois pas précisé l'intitulé de la question qui serait posée aux Grecs.

Au sein du gouvernement grec, une voix discordante s'est faite entendre dès jeudi matin, le ministre des Finances Evangélos Vénizélos se déclarant opposé au référendum, estimant que l'appartenance de la Grèce à l'euro est «une conquête historique» qui «ne peut pas être mise en question».

«Ceci ne peut pas dépendre d'un référendum», a prévenu M. Vénizélos dans un communiqué publié à Athènes à son retour de Cannes.

Nicolas Sarkozy a aussi prévenu que les Européens et le FMI ne pourraient pas «verser le moindre centime» à la Grèce tant qu'elle n'aura pas «adopté l'ensemble» du plan anti-crise européen et tant que «toute incertitude sur l'issue du référendum» n'aura pas été «levée».

La menace financière a également été agitée par la directrice générale du Fonds, Christine Lagarde, qui ne recommandera à son institution le déblocage de l'argent promis à Athènes que lorsque «le référendum sera achevé, et toutes les incertitudes levées».

La Grèce attend le versement, par les Européens et le FMI, de huit milliards d'euros issus du prêt de 110 milliards d'euros au total du premier plan d'aide décidé en mai 2010. Elle en a besoin pour continuer à payer ses fonctionnaires et faire face à ses prochaines échéances de remboursement de sa dette.

Selon plusieurs sources, les caisses de l'État grec seront vides d'ici décembre.

Alors que le référendum était initialement envisagé pour janvier, Georges Papandréou a donc annoncé qu'il pourrait avoir lieu le 4 décembre, dans un mois.

Un responsable gouvernemental européen prévient: un «non» grec serait «malheureux pour la Grèce, car leur sort en dehors de la zone euro serait bien pire que les solutions qu'on leur propose aujourd'hui. Mais s'ils le décident, eh bien, qu'ils en sortent !"

Lançant un «appel urgent et vibrant en faveur de l'unité nationale» en Grèce, le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, a aussi prévenu que les conséquences d'un rejet du plan «seraient imprévisibles», surtout pour les plus vulnérables.

Les Européens doivent se retrouver à nouveau jeudi matin, avec les dirigeants italien et espagnol, pour coordonner leur position avant le sommet des 20 principaux pays riches et émergents de la planète.

Premier pays en ligne de mire des marchés en cas de contagion de la crise grecque, l'Italie a adopté mercredi soir au cours d'un conseil des ministres extraordinaire de nouvelles mesures anti-crise qu'il compte présenter au G20.

La décision grecque a bouleversé toute la stratégie du G20. L'ambition initiale de ce sommet de Cannes était d'éviter au monde de replonger dans le marasme économique.

Les Européens comptaient y présenter à leurs partenaires leur plan de sortie de crise adopté la semaine dernière à Bruxelles, dont le but était aussi de rétablir la confiance et de rassurer les États-Unis et les pays émergents, inquiets de voir les problèmes européens stopper la croissance mondiale. Mais la mise en oeuvre de ce plan est désormais menacée par un «non» au référendum grec.

L'urgence grecque chamboule aussi tous les efforts de la présidence française du G20 pour obtenir, de la part des grandes puissances émergentes, une participation claire à l'effort contre les risques de nouvelle récession et une contribution financière au fonds de secours de la zone euro. Ces derniers, Chine en tête, demandaient aux Européens de ramener le calme sur les marchés avant de se prononcer.

Une source proche de la présidence française du G20 a toutefois assuré que Pékin abordait le sommet de jeudi et vendredi «avec un esprit très ouvert», malgré le problème grec.

Le président chinois Hu Jintao, qui a dîné mercredi soir avec Nicolas Sarkozy lors d'une pause du mini-sommet sur la Grèce, a déclaré que c'était «surtout à l'Europe de régler le problème de sa dette», tout en se disant confiant dans la capacité du Vieux Contient à faire face, a rapporté jeudi l'agence Chine Nouvelle.