L'agence d'évaluation financière Moody's a asséné mardi un coup dur à l'Espagne en abaissant la note de solvabilité du pays de deux crans, et en indiquant que celle-ci risquait d'être abaissée encore à moyen terme.

L'agence note désormais «A1» les obligations d'État espagnoles à long terme, et non plus «Aa2», refusant ainsi à l'Espagne le statut d'émetteur de haute qualité pour la ravaler au rang des émetteurs solides mais susceptibles d'être affectés par des changements de la situation économique.

«A1» correspond à la cinquième meilleure note sur l'échelle de Moody's.

Celle-ci est plus dure avec l'Espagne que ses concurrentes Standard & Poor's et Fitch, qui ont toutes deux abaissé la note du pays à «AA-» (quatrième meilleure note) dans les quinze derniers jours.

Moody's justifie sa décision par le fait qu'à ses yeux, «l'Espagne continue d'être vulnérable aux tensions sur les marchés», que sa croissance économique ne devrait atteindre que «1% au mieux» en 2012 (et non 1,8% comme elle le pensait jusque-là), et que cela «rendra encore plus difficile la réalisation des objectifs budgétaires ambitieux» du pays.

L'agence s'inquiète en particulier de la capacité des collectivités régionales indépendantes à atteindre leurs objectifs.

Moody's avait annoncé fin juillet qu'elle envisageait d'abaisser la note de l'Espagne.

«Depuis lors, écrit l'agence, les défis de financement» qui se posent aux États européens, «ainsi que l'incertitude entourant les détails du soutien à venir à la zone euro comme la croissance économique à court terme (et partant la probabilité d'une réduction plus forte des déficits) ont augmenté plutôt que diminué».

L'agence rappelle à ce sujet que sa décision d'abaisser la note de Madrid, suit sa sanction vis-à-vis de l'Italie (dont elle a abaissé la note de trois crans à «A2» au début du mois) et sa menace agitée le 7 octobre, d'abaisser la très bonne note qu'elle attribue à la Belgique («Aa1»).

En ce qui concerne l'Espagne, Moody's a maintenu la «perspective négative» qu'elle attribue à la note du pays. Cela «reflète les risques que fait peser sur le pays une éventuelle aggravation de la crise de la zone euro», écrit l'agence.

Selon elle, le gouvernement qui sortira des élections législatives du 20 novembre sera «fermement engagé à continuer sur la voie du rééquilibrage des finances publiques», ouverte par le cabinet sortant dirigé par le socialiste José Luis Rodriguez Zapatero.

Donnée favorite dans les sondages, l'opposition de droite du Parti populaire espagnol a promis l'austérité face à la crise et des mesures de soutien à l'emploi afin de faire baisser un taux de chômage de près de 21%.

L'agence menace le pays de voir sa note «soumise à des pressions à la baisse supplémentaires si cette attente ne se matérialise pas».

En revanche, indique-t-elle, «la mise en oeuvre d'une politique crédible et rigoureuse de réformes budgétaires et structurelles de moyen terme, accompagnée d'une solution convaincante à la crise de la zone euro, entraînerait un retour à une perspective stable» pour la note espagnole.

Moody's justifie le fait qu'elle ne considère plus l'Espagne comme un émetteur de haute qualité (contrairement à ses deux concurrentes) par le fait que le pays est exposé à une «contagion possible» de chocs extérieurs et à ses propres «fragilités internes».

Selon elle, la force de l'économie espagnole à long terme n'est plus «très élevée mais seulement moyenne, étant donné que le rééquilibrage économique s'annonce long» pour le pays.

L'Espagne a émis mardi pour 4,602 milliards d'euros de bons à 12 et 18 mois, en maintenant des taux stables par rapport aux dernières émissions malgré la dégradation de sa note par Standard & Poor's et Fitch.