L'agence d'évaluation financière Fitch Ratings a abaissé vendredi de deux crans la note à long terme de l'Espagne, d'un cran celle de l'Italie et confirmé la note souveraine du Portugal. Les trois pays seront sous haute surveillance d'ici la fin de l'année.

La note de l'Espagne s'établit désormais à «AA-», contre «AA+» auparavant, ce qui la place dans la 4e note la plus élevée, sur vingt possibles.

Plus inquiétant, elle est assortie d'une perspective «négative», qui implique que l'agence pourrait l'abaisser de nouveau à moyen terme, une mauvaise nouvelle alors qu'une autre agence, Moody's, devrait se prononcer d'ici fin octobre sur une nouvelle dégradation de la note, de Aa2 à Aa3.

Pour justifier sa décision, Fitch évoque «l'intensification de la crise en zone euro».

«Avec des besoins de financement importants» de l'Etat espagnol, pour couvrir ses dépenses budgétaires et sa dette nette externe qui est «l'une des plus élevées au monde» (91% du PIB), rappelle Fitch, «la volatilité plus forte a un effet négatif sur les conditions de financement sur le marché de l'Espagne».

Mais il y a aussi des facteurs internes au pays: «les risques pour la consolidation budgétaire du fait des performances de certaines régions» et «la révision à la baisse des perspectives de croissance de l'Espagne à moyen terme».

Les finances des 17 régions espagnoles sont une source récurrente d'inquiétudes pour les marchés, en raison de leur lourd endettement, qui représentait fin juin 133,172 milliards d'euros, soit 12,4% du PIB du pays, un record historique.

Le 14 septembre, Fitch avait déjà abaissé la note de cinq régions espagnoles, dont la puissante Catalogne, critiquant «la forte augmentation de leur endettement».

De même, le pays dans son ensemble peine à renouer avec la croissance depuis la crise et l'éclatement de sa bulle immobilière.

La prévision du gouvernement pour 2011 est une croissance de 1,3%, mais il existe un consensus, partagé par la Banque d'Espagne, le Fonds monétaire international (FMI) et Standard & Poor's, autour de 0,8%.

«Le processus de rééquilibrage de l'économie espagnole est bien en marche mais il n'est pas encore fini et Fitch s'attend à ce qu'il pèse encore plus lourdement sur la croissance économique à moyen terme», explique l'agence de notation, qui table sur une croissance annuelle sous les 2% jusqu'en 2015, avec toujours un chômage élevé.

Néanmoins, Fitch se montre optimiste sur le long terme, c'est-à-dire après 2015, où elle prévoit «un rythme de croissance potentiel au-dessus de la moyenne de la zone euro».

Sa perspective négative tient aux «risques d'une nouvelle intensification de la crise financière en zone euro, ainsi qu'à une possible déviation en termes budgétaires».

Enfin, l'agence pourrait aussi dégrader encore la note espagnole si les coûts de la recapitalisation du secteur bancaire dépassaient ses propres estimations (30 milliards d'euros à partir de 2012).

Décote et perspectives négatives pour l'Italie

L'agence a aussi abaissé d'un cran la note de l'Italie, en raison des conséquences de l'aggravation de la crise en zone euro, et n'exclut pas de la dégrader encore si le pays devait manquer ses objectifs de réduction du déficit.

La note du pays revient ainsi à «A+», contre «AA-» jusqu'à présent, assortie d'une perspective «négative», qui implique que l'agence pourrait l'abaisser de nouveau à moyen terme, selon un communiqué.

Fitch était la dernière des trois grandes agences de notation internationale à ne pas avoir récemment abaissé la note de l'Italie.

Moody's la note désormais «A2» (soit trois crans de moins qu'auparavant) et Standard & Poor's à «A» (soit un cran de moins qu'auparavant). En dépit de sa décision de vendredi, Fitch continue à noter un peu mieux la dette souveraine de la péninsule que ses concurrentes (de l'ordre d'un cran de plus).

Dans son communiqué, Fitch explique que «le haut niveau de la dette publique et les besoins de financement budgétaire, cumulé avec le faible niveau de la croissance potentielle (du pays), ont rendu l'Italie particulièrement vulnérable à un choc externe», tel que celui généré par la crise de la zone euro.

«Si le récent collectif budgétaire a renforcé de manière substantielle l'effort de consolidation des comptes publics, les hésitations initiales du gouvernement italien pour apporter une réponse à la contagion a aussi érodé la confiance du marché dans sa capacité à piloter efficacement le pays dans la crise de la zone euro», note l'agence.

Fitch prévient qu'elle serait amenée à abaisser de nouveau la note de la dette du pays si le gouvernement devait s'écarter de son objectif de réduction de la dette publique.

Le Portugal épargné, mais...

Fitch Ratings a par ailleurs confirmé la note souveraine du Portugal à «BBB-», et son maintien sous surveillance négative, au moins jusqu'à la fin de l'année.

L'agence de notation a précisé qu'elle prendrait notamment en compte, pour décider ou non un nouvel abaissement de cette note, les performances du pays relatives au programme de l'Union européenne et du Fonds monétaire international (FMI), son budget pour 2012, les avancées en matière de privatisations ainsi que les risques concernant son secteur bancaire et ses perspectives économiques et budgétaires à moyen terme.

L'agence de notation Standard and Poor's avait confirmé mardi la note «BBB-» du Portugal, tout en maintenant elle aussi une perspective négative, ce qui signifie qu'elle pourrait l'abaisser encore dans les mois qui viennent.

Le Portugal, troisième pays après la Grèce et l'Irlande à bénéficier d'une assistance financière internationale, est confronté à de nouvelles difficultés qui mettent à mal ses efforts pour assainir ses comptes publics et qui risquent encore de durcir le programme d'austérité déjà en vigueur.

La semaine dernière, les statistiques officielles ont révélé un déficit public au premier semestre plus important qu'escompté (à 8,3% du PIB) et loin encore de l'objectif que s'était fixé le gouvernement de le ramener à 5,9% à la fin de l'année, après la découverte de dettes non déclarées de l'archipel de Madère.

Malgré ce dérapage, le gouvernement portugais a réaffirmé son engagement à respecter ses objectifs budgétaires cette année.