L'Allemagne a finalement répondu par un oui bien net à l'accord du 21 juillet qui vise à porter à 440 milliards d'euros le Fonds européen de stabilité financière (FESF) et d'en étendre le rôle.

Cela porte à 11 sur 17 le nombre d'États membres de la zone euro qui ont adopté l'accord auquel est rattaché un deuxième plan de sauvetage de la Grèce. Aujourd'hui, ce sera à l'Autriche de le ratifier. L'unanimité des 17 est requise.

Le chèque de 8 milliards qu'attend Athènes pour payer ses fonctionnaires et ses retraités à partir d'octobre lui parviendra si la troïka formée de l'Union européenne, du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque centrale européenne (BCE) conviennent que les mesures d'austérité exigées en contrepartie de l'aide sont en bonne voie de réalisation.

Leur délégation a été accueillie hier par des manifestants hostiles qui tentaient de l'empêcher de rencontrer le ministre grec des Finances, Evangelos Venizelos. Les mesures d'austérité font en sorte que le pays du bouzouki n'a pas connu de reprise depuis la récession mondiale de 2008-2009.

Les marchés financiers ne croient pas que le plan de sauvetage prévienne une faillite de l'État hellène. En revanche, elle pourrait être organisée et gérée de manière à faire payer en partie les détenteurs de la dette grecque, surtout des banques européennes.

Les amendements du 21 juillet au FESF lui permettraient de participer au sauvetage des banques qui se retrouveraient en difficultés par suite d'une radiation de leur portefeuille de dette qui pourrait atteindre de 20% à 40% de leur valeur faciale.

Les investisseurs craignent aussi de plus en plus que l'Italie soit incapable de se financer sur les marchés qui exigent des rendements désormais très élevés. Hier, Rome a vendu pour 6,9 milliards d'euros d'obligations venant à échéance dans 10 ans pour lesquelles elle a dû consentir un taux de 5,86%. Il y a un mois, elle avait trouvé preneur à 5,22% seulement.

Hier, le Corriere della Sera a révélé que le président sortant de la BCE et son successeur, Jean-Claude Trichet et Mario Draghi, avaient envoyé en août au premier ministre Silvio Berlusconi une lettre lui enjoignant de prendre des mesures énergiques et essentielles de réduction du déficit budgétaire avant le 30 septembre. Au même moment, la BCE s'est mise à acheter des obligations italiennes, ce qui avait entraîné la démission de son économiste en chef. La lettre a débouché sur un plan d'austérité de 60 milliards d'euros qui a fait dire à l'opposition italienne que le pays avait été mis en tutelle par la BCE.

Selon les calculs de la Banque Nationale, les banques européennes sont très fragilisées par la dette grecque, portugaise, irlandaise, italienne et espagnole, les cinq pays qui traversent une crise fiscale. Les banques françaises en détiendraient pour 671,7 milliards, ce qui équivaut 24,4% de la taille de l'économie de l'Hexagone. Le portefeuille des banques allemandes représente 14,4% de la première économie d'Europe.

En comparaison, les 175,2 milliards aux mains des banques américaines équivalent à peine à 1,2% du produit intérieur brut (PIB) des États-Unis. Les banques canadiennes en détiennent pour leur part... 15 milliards.

Bref, sous la crise grecque couve une crise financière européenne systémique qui doit être rapidement contenue pour ne pas qu'elle éclate et pousse l'économie mondiale dans une nouvelle et grave récession.

Voilà pourquoi il est de plus en plus question d'utiliser le FESF comme levier pour emprunter jusqu'à 2000 milliards d'euros de manière à faire face à toute éventualité. Cela équivaut cependant à monétiser la dette des pays les plus mal en point, ce qui fait regimber l'Allemagne.

Hier, la chancelière Angela Merkel a obtenu une victoire parlementaire sans équivoque: 523 députés ont voté pour, 85 contre, 3 se sont abstenus et 9 n'ont pas pris part au vote.

Le résultat est d'autant plus fort pour Mme Merkel que 315 députés membres de sa coalition l'ont soutenue. S'il y en avait quatre de moins, le oui aurait été acquis grâce à l'appui de l'opposition sociale-démocrate ce qui aurait miné son leadership.

Le oui porte de 123 à 211 milliards d'euros la garantie de l'Allemagne dans le FESF.

Il est loin d'être acquis que la chancelière saura garder sa majorité s'il fallait l'étendre pour gonfler la puissance de feu du FESF à 2000 milliards.

L'économie allemande ronronne toujours. En août, le taux de chômage a atteint 6,9%. Il s'agit du plus faible depuis la réunification en 1989.

Les contribuables allemands comprennent-ils qu'ils doivent une bonne partie de ce succès à la zone euro dans laquelle ils peuvent exporter à des prix très concurrentiels?