En Allemagne l'humeur des entrepreneurs s'assombrit et les milieux financiers s'affolent, selon les derniers indicateurs qui prouvent que la première économie européenne n'est plus vaccinée contre les turbulences de la conjoncture mondiale.

L'Ifo, principal indice de confiance des entreprises allemandes, a accusé mercredi une baisse plus importante que prévu en août, à 108,7 points, contre 112,9 points en juillet, soit une chute de 4,2 points en un mois.

Il s'agit de son plus fort repli sur un mois depuis novembre 2008, où il avait lâché 4,9 points.

«Le contexte économique mondial s'est quelque peu assombri, l'économie allemande n'y est pas insensible» a déclaré le ministre de l'Économie Philipp Rösler dans un communiqué.

«Les turbulences sur les marchés financiers et de devises, les crises de la dette publique dans certains pays de la zone euro et l'évolution de l'économie américaine contribuent au climat d'incertitude», a-t-il rappelé.

Les entreprises allemandes ont revu à la baisse leur évaluation de la situation économique actuelle et leurs perspectives pour les six prochains mois, lesquelles n'avaient pas autant chuté sur un mois (-4,9 points) depuis octobre 2008 et les heures sombres de l'après Lehman Brothers.

Mardi l'indice Zew, qui mesure la confiance des milieux financiers allemands pour les six mois à venir, avait donné un avant-goût de l'Ifo en connaissant sa pire dégringolade sur un mois depuis l'automne 2008 également.

Mais la débâcle du Zew n'était pas vraiment une surprise dans le contexte du récent vent de panique boursière, et les économistes attendaient surtout l'Ifo pour jauger la confiance dans l'économie allemande. Mercredi leur déception était palpable.

«C'est une nouvelle fois un indicateur extrêmement décevant pour l'Allemagne et la zone euro dans son ensemble» estimait Chris Williamson de l'institut Markit.

«L'économie allemande, qui s'élevait très haut ces deux dernières années, se prépare à présent à l'atterrissage» commentait pour sa part Andreas Rees de UniCredit.

«De nouveaux chocs sur la confiance ne sont pas à exclure et le risque d'une récession reste élevé» ajoutait Christian Schultz de la banque Berenberg.

Après une croissance de 1,3% en début d'année, l'économie allemande s'est essoufflée au deuxième trimestre, le Produit intérieur brut (PIB) n'ayant augmenté que de 0,1% par rapport au premier.

Toutefois le gouvernement fédéral, la Bundesbank et beaucoup d'économistes tablent toujours sur une croissance d'environ 3% pour cette année. Le scénario d'une récession est pour le moment exclu.

Car l'Allemagne a encore plusieurs cordes à son arc. Les carnets de commandes des constructeurs automobiles sont pleins à craquer, et le secteur des machines-outils, autre champion allemand de l'export, attend toujours une croissance de son chiffre d'affaires supérieure à 10% cette année.

«Nous n'aurons peut-être plus une croissance ¨XXL¨ mais seulement ¨XL¨, on ne doit pas s'en plaindre» a déclaré Hans Heinrich Driftmann, le président de la fédération allemande de l'industrie et des chambres de commerce dans un entretien au Handelsblatt paru mercredi.

Il a balayé les craintes sur un effondrement de la conjoncture des pays émergents comme la Chine, dont dépend de plus en plus l'économie allemande, préférant plutôt parler d'une «normalisation» de leur croissance.

Par ailleurs l'Allemagne bénéficie de conditions de financement exceptionnellement avantageuses -une rareté en zone euro par les temps qui courent- et d'un faible taux de chômage (7% en juillet) qui soutient encore, pour l'instant, le moral des ménages.