Le secrétaire au Trésor des États-Unis Timothy Geithner, pièce essentielle du dispositif de Barack Obama dans la lutte contre la crise économique, est prêt à sacrifier beaucoup pour ne pas laisser son président seul face aux critiques.

Deux jours après la perte vendredi de la note «AAA» attribuée aux États-Unis par l'agence de notation Standard and Poor's, M. Geithner a mis fin aux spéculations autour de son éventuel départ.

«Il est prêt à effectuer l'important travail (qui l'attend) pour répondre aux défis auxquels est contronté notre grand pays», a affirmé le Trésor dans un communiqué dimanche.

Pour un homme que l'on disait prêt à passer la main après deux ans et demi de travail intense, cela signifiera de rester à Washington quand sa famille déménagera à New York, où son fils est inscrit au lycée.

Certains l'auraient bien vu partir. La décision de S&P a ravivé des appels à la démission auxquels M. Geithner, parmi les cibles préférées des républicains, s'est habitué depuis sa prise de fonctions en janvier 2009.

Mais M. Obama a jugé impensable de s'en séparer à un moment où la croissance de la première économie mondiale s'évapore et où la capacité des États-Unis à régler leur problème de dette est mise en doute.

Selon le New York Times, le secrétaire au Trésor plaisantait ces dernières semaines sur le «bracelet électronique» que lui faisait porter la Maison Blanche. Car s'il était parti, il aurait en effet fallu au président assumer seul la responsabilité du bilan économique des deux ans et demi passés, peu reluisant.

Cette question évacuée, M. Geithner s'est montré offensif. «Je pense que S&P a émis un jugement terriblement mal avisé», a-t-il dit sur la chaîne NBC, toujours avec son débit très rapide.

«Il n'y a aucun risque que les États-Unis n'honorent pas leurs engagements», ajoutait-il. Ses adversaires relèveront qu'en avril, il n'y avait «aucun risque» non plus que les États-Unis perdent leur «AAA».

M. Geithner, qui fêtera ce mois-ci ses 50 ans deux semaines après M. Obama, est devenu au fil des ans de plus en plus proche de son président. Ils ont pourtant peu de points communs.

Alors que le locataire de la Maison Blanche est arrivé au sommet de l'État en gravissant l'échelle élection après élection, celui du Trésor n'est affilié à aucun parti et a mené une carrière de haut fonctionnaire.

M. Geithner laisse régulièrement paraître son peu d'entrain pour la politique. «Washington est un endroit incroyablement difficile à comprendre», répétait-il en avril, quand ne faisaient que commencer les querelles autour du relèvement du plafond de la dette.

C'est pourtant la capitale fédérale qui a fait de M. Geithner ce qu'il est. Ce surdoué qui a étudié le chinois et le japonais, économiste de formation, est entré au Trésor à 27 ans. Considéré comme un élément brillant, il est détaché au Fonds monétaire international à 40 ans, après l'élection de George W. Bush comme président.

À 42 ans, il décroche le poste le plus prestigieux possible pour un fonctionnaire dans sa ville natale: président de la Banque de Réserve fédérale de New York, soit le deuxième homme le plus influent de la banque centrale du pays.

Il y passera cinq ans, marqués par la crise financière de l'automne 2008. M. Obama, élu en novembre de cette année-là, le rappelle alors à Washington pour le poste de secrétaire au Trésor. Impossible de refuser.