Q: Qu'est-ce qui a motivé l'agence Standard & Poor's (S&P) à abaisser la note de crédit des États-Unis de AAA à AA+?

R: S&P semble inquiète de l'incapacité du cadre politique américain à s'attaquer aux problèmes de la dette et des déficits. Il est en effet aberrant de constater que les législateurs de la première puissance mondiale soient presque incapables de s'entendre pour relever le plafond de la dette. La trajectoire future de la dette américaine, qui est appelée à augmenter fortement au cours de la prochaine décennie, est par ailleurs inquiétante.

Q: Pourquoi la dette américaine est-elle si élevée?

R: Le déficit structurel du gouvernement fédéral américain s'est développé au cours de la dernière décennie, alors que les augmentations de dépenses militaires, sociales et autres n'ont pas été équilibrées par des hausses équivalentes des recettes fiscales. La crise financière de 2008 a exacerbé ce phénomène par un vaste transfert des dettes du secteur privé vers le bilan du secteur public.

Q: Les rares Bourses à être ouverte le dimanche, soit celles d'Israël et des pays du Golfe, ont déjà enregistré une dégringolade importante hier. Peut-on s'attendre à la même chose sur les grandes Bourses dans les prochains jours?

R: Bien que S&P ne nous apprenne rien de nouveau quant à l'état de la dette américaine, la confiance des investisseurs risque d'être ébranlée par l'annonce. Il est donc raisonnable de s'attendre à des jours difficiles sur les Bourses mondiales au cours des prochains jours.

Q: Outre la dégringolade de la Bourse, quels pourraient être les impacts de la décote?

R: À court terme, plusieurs observateurs s'attendent à une hausse vertigineuse des taux obligataires américains. Cette conclusion présuppose toutefois que les investisseurs vendront massivement les titres du Trésor américain pour se réfugier ailleurs. Je ne suis pas convaincu qu'une telle liquidation se produira, car il existe peu de valeurs refuges comparables et les obligations du Trésor s'avèrent être très populaires lors de ralentissements économiques semblables à celui que nous vivons actuellement. La valeur du dollar américain pourrait toutefois souffrir de la dégradation.

Q: Pourquoi l'onde de choc risque-t-elle de se faire ressentir jusqu'en Chine?

R: La Chine est un important détenteur d'obligations du Trésor américain en raison des multiples excédents commerciaux enregistrés par le pays au cours des dernières années. Les autorités chinoises voient donc d'un très mauvais oeil toute détérioration des finances publiques américaines, car ceci affecte directement leur portefeuille d'investissements. Tout ralentissement marqué de l'économie américaine aurait également un effet dévastateur sur l'économie chinoise.

Q: La note de crédit du Canada, fixée à AAA, est-elle à risque?

R: À court terme, non : le Canada paraît plutôt bien en comparaison de plusieurs pays industrialisés. À plus long terme toutefois, il convient de s'interroger quant à la dette et aux budgets de plusieurs provinces canadiennes, dont l'Ontario et le Québec. Comme presque partout ailleurs en Occident, l'explosion des coûts de santé rendra très difficile l'assainissement des finances publiques. Ceci pèsera donc sur la dette de plusieurs provinces canadiennes et, indirectement, du gouvernement fédéral.