Combien les avocats des victimes de Norbourg doivent-ils être payés pour leurs conseils depuis six ans? La question divise les victimes de Vincent Lacroix, alors que la Cour supérieure s'apprête à trancher la question.

Les avocats demandent 20% de l'entente à l'amiable de 55 millions de dollars intervenue en janvier dernier avec l'Autorité des marchés financiers (AMF), Northern Trust et KPMG. Ce sont 11 millions de dollars qui seraient séparés entre 14 avocats, dont Me Jacques Larochelle, l'un des avocats les plus réputés du Québec, Me Serge Létourneau, spécialiste de la responsabilité civile dans le milieu financier, et son associée, Me Suzanne Gagné.

Le juge André Prévost entendra ce matin les doléances de trois victimes de Norbourg, qui estiment les honoraires de leurs avocats trop élevés. «C'est pas mal d'argent. Moi, je dirais de leur donner de 3% à 5%. Je comprends d'accepter le 100% de l'argent volé (et de renoncer aux rendements), mais les honoraires d'avocats, ce n'est pas à nous de payer ça, c'est aux défendeurs», dit Jean-Guy Houle, qui avait investi l'héritage de 195 000$ de ses deux petites-filles orphelines dans les fonds Norbourg.

«C'est disproportionné. À mon avis, 6,5% de l'entente serait une rémunération raisonnable. Ils calculent à 400$ l'heure. Ça donne des salaires de 700 000$ par année», dit François Leblanc, conseiller en relations industrielles dont la famille a perdu plusieurs centaines de milliers de dollars dans Norbourg.

Les deux requérants aux recours collectifs, qui ont participé aux négociations de l'entente en août et en décembre dernier, sont d'avis contraire. Au début des recours, Wilhelm Pellemans et Michel Vézina ont accepté de donner 20% des sommes récupérées aux avocats.

«Nous avons une entente exceptionnelle. La plupart des règlements vont autour de 60%, et les honoraires vont quand même chercher de 20 à 25%», dit Wilhelm Pellemans, chirurgien plastique agissant à titre de requérant qui a témoigné hier devant le juge André Prévost.

«Il faut respecter le contrat. Les avocats ont fait un travail phénoménal. Il faut être conscient qu'on a eu un règlement exceptionnel», dit Michel Vézina, autre victime de Norbourg qui a témoigné hier devant le tribunal. MM. Vézina et Pellemans ne paieront pas de frais d'avocats en raison du temps qu'ils ont consacré au dossier.

Des honoraires de 20%

Pour justifier leurs demandes salariales, les avocats des victimes de Norbourg font notamment valoir que les quatre contrats signés avec les victimes de Norbourg prévoient tous des honoraires de 20%. «Les honoraires ne sont pas excessifs compte tenu des résultats obtenus par les membres (des recours collectifs). Au Québec, la règle de base est l'application des conventions d'honoraires. C'est le mode de rémunération le moins imprévisible pour les procureurs et les requérants. C'est pourquoi les tribunaux hésitent à briser une entente, qui reflète la volonté des parties», dit Me Pierre Sylvestre, spécialiste engagé par les avocats des victimes pour présenter son point de vue au tribunal.

Si le juge Prévost ne retient pas la facture de 11 millions prévue au contrat, Me Pierre Sylvestre suggère des honoraires de 8,4 millions. Le magistrat doit approuver l'entente à l'amiable et les honoraires des avocats avant la fin du mois. «Je suis conscient que les investisseurs de Norbourg ont vécu des moments difficiles, tant à cause des pertes financières que des nombreux recours qui ont suivi. La conclusion de cette affaire approche», a dit le juge André Prévost hier en guise de préambule.

En raison des délais d'appel judiciaire, le liquidateur de Norbourg, Martin Daigneault, estime qu'il pourrait recevoir les sommes de l'entente à l'amiable à la mi-mai. Les investisseurs de Norbourg recevront ainsi leur chèque avant la fin de juillet.

Des propos qui rassurent les victimes de Norbourg. «On commence à sentir notre argent», dit Michel Vézina, 71 ans, qui a dû retourner travailler comme débosseleur, puis comme employé dans la rénovation pour financer ses vieux jours en raison de l'affaire Norbourg.