Québec examinera la possibilité de créer un fonds d'indemnisation des investisseurs victimes de fraudes et de négligence des conseillers en placement et des gestionnaires.

Le ministre des Finances, Raymond Bachand, a dit jeudi avoir demandé à l'Autorité des marchés financiers (AMF) de mener un débat à ce sujet, dès ce printemps, et de consulter l'industrie à cette fin.

Il faut «voir s'il y a lieu de mettre sur pied quelque chose de différent et comment ça devrait être fait, en entendant toute l'industrie», a dit le ministre Bachand, lors d'un bref point de presse en marge d'une réunion du caucus des députés libéraux en banlieue de Québec.

L'AMF pourra notamment s'inspirer du mémoire qui lui a été présenté jeudi par un groupe d'experts du monde de la finance, qui étudiait la question depuis 2006.

Le groupe, qui comprend des professionnels de l'industrie du placement ainsi que des représentants de la Coalition pour la protection des investisseurs et du Mouvement d'éducation et de défense des actionnaires (MÉDAC), estime que la création d'un fonds universel est devenue essentielle.

L'ancienne présidente du Bureau des services financiers, Louise Champoux-Paillé, a souligné qu'il était aujourd'hui «plus sécuritaire d'acheter une voiture usagée qu'un fonds collectif».

Le nouveau fonds couvrirait les activités de tous les véhicules de placement collectifs accessibles aux particuliers. Il serait financé par les épargnants eux-mêmes, à raison de quelques cents par tranche de 100 $ investis.

Des fonds d'indemnisation de ce type existent déjà au Québec mais ils ne couvrent que les victimes des représentants en assurance de personnes et en assurance de dommages, des experts en sinistres, des planificateurs financiers et des représentants en épargne collective. La plupart des victimes de Norbourg n'ont donc pu en profiter.

En plus d'indemniser les victimes de criminels à cravate, le nouveau fonds ferait de l'éducation et de l'information. Il représenterait aussi les investisseurs auprès des grandes associations de l'industrie, comme l'Institut canadien des fonds d'investissement (IFIC).

L'organisme pourrait en outre évaluer annuellement les gestionnaires, les cabinets de conseils, les gardiens de valeurs et les autres intermédiaires puis leur attribuer une note qui serait rendue publique.

De l'avis de Claude Castonguay, une protection comme celle que propose le groupe devrait aller de soi. «C'est une chose qui est tout à fait normale. On assure son automobile, on assure sa maison, on assure ses biens contre le vol. On doit les assurer il me semble contre la fraude et la négligence s'il y en a», a-t-il insisté, en marge d'un point de presse à Montréal.

Norbourg

Raymond Bachand s'est par ailleurs réjoui du règlement intervenu en faveur des 9200 investisseurs victimes d'une fraude orchestrée par «le bandit en chef» de Norbourg, Vincent Lacroix. Ils pourront ainsi se partager quelque 55 millions $.

Cette somme s'ajoutera aux montants déjà versés par le Fonds d'indemnisation des services financiers de l'AMF, de même qu'aux montants récupérés par les syndics de faillite, par le liquidateur et par Revenu Québec.

«Je suis très, très, très heureux pour les gens qui ont retrouvé une grande partie de l'argent», a dit M. Bachand, tout en reconnaissant que pour les victimes de Vincent Lacroix, le processus menant à l'indemnisation avait été long et compliqué.

Le règlement hors cour du recours collectif intenté par les victimes ne signifie pas pour autant un aveu de culpabilité de la part de l'AMF, a-t-il ajouté.

L'entente a permis d'éviter un procès pour lequel on avait prévu 16 mois et 138 jours d'audiences. Elle a quand même nécessité de longues négociations, amorcées en juin dernier, qui se sont avérées particulièrement difficiles par moments.

Aucune des parties visées par le recours, soit l'AMF, les cabinets comptables KPMG et Beaulieu-Deschambault, le gardien de valeurs Northern Trust et la Fiducie Concerta, n'a reconnu sa responsabilité dans le scandale.

Les victimes ont d'autre part accepté de renoncer à leur recours contre la Caisse de dépôt et placement du Québec.