Le gouvernement canadien a promis hier de défendre le groupe canadien Research In Motion (RIM), fabricant du téléphone mobile BlackBerry, que les Émirats arabes unis et l'Arabie Saoudite ont décidé de suspendre, faute de pouvoir accéder à ses serveurs et à leurs contenus.

«Notre gouvernement va se porter à la défense de RIM, comme entreprise canadienne, et du BlackBerry, comme nous le faisons chaque fois que des entreprises canadiennes faisant affaire à l'étranger sont confrontées à ce genre de défi», a dit le ministre du Commerce international, Peter Van Loan, à l'agence de presse financière Dow Jones.

Les Émirats arabes unis ont décidé dimanche de suspendre à partir du 11 octobre les principaux services du téléphone multifonctions BlackBerry, car il soulèverait des «problèmes de sécurité».

L'Arabie Saoudite leur a emboîté le pas, en exigeant de pouvoir surveiller les appareils de RIM.

Il s'agit notamment des services de messagerie instantanée, courrier électronique et navigation internet.

Ces pays du Golfe censurent l'accès à internet, notamment aux sites pornographiques ou présentant des images de nudité, ainsi qu'à certains sites politiques.

D'autres pays, comme l'Inde, menacent également d'interdire certains services des appareils de RIM.

Ces interdictions risquent d'avoir «de vastes implications sur la libre circulation des communications et de l'information», a déclaré M. Van Loan.

Le ministre a fait part de son inquiétude face à ces mesures qui, a-t-il dit, interviennent alors que ces pays, notamment les États arabes unis, tentent de se positionner comme des plateformes importantes pour faire des affaires dans le monde aujourd'hui.

«C'est pourquoi je suis surpris qu'ils parlent de mesures comme cela, qui minent clairement leur objectif plus large de se positionner comme un endroit favorable pour faire des affaires», a-t-il déclaré.

M. Van Loan a indiqué que le gouvernement canadien, de concert avec RIM, était en contact avec les Émirats arabes, l'Arabie Saoudite et d'autres pays pour trouver une «solution constructive» au différend.

À Washington, la secrétaire d'État américaine, Hillary Clinton, a dit hier que des experts américains et émiratis s'entretiendraient des services du BlackBerry. «Nous prenons le temps de nous concerter et d'analyser tout l'éventail des intérêts et des aspects du dossier parce que nous sommes conscients que se posent des questions légitimes de sécurité. Mais il existe également un droit légitime à un accès et à une utilisation sans entraves» du BlackBerry, a dit Mme Clinton.

«Je pense donc que nous allons mener des discussions techniques et d'experts», a-t-elle ajouté.

Mike Lazaridis indigné

Le codirecteur général de RIM, Mike Lazaridis, a jugé inconcevable que des gouvernements puissent interdire le cryptage des télécommunications. «Si on interdisait un cryptage fort, cela fermerait (les communications pour) les sociétés, les commerces, les banques, internet», a-t-il déclaré mercredi dans un entretien au New York Times.

M. Lazaridi a tenu des propos encore plus musclés au Wall Street Journal en parlant des Émirats et de l'Arabie Saoudite. «C'est un débat sur l'internet. Tout est crypté sur l'internet. Ça va bien au-delà du BlackBerry. S'ils ne peuvent pas vivre avec l'internet, ils n'ont qu'à interdire l'accès au web.»

Par ailleurs, le gouvernement indonésien a démenti hier envisager de bloquer l'accès à certains services du téléphone multifonctions BlackBerry. Un porte-parole du ministère de la Communication, Gatot Dewa Broto, a qualifié d'inexactes des informations de presse publiées sur une éventuelle suspension de certains services de messages électroniques cryptés.

«Il n'est pas vrai que nous prévoyons d'interdire les services de BlackBerry en Indonésie. Nous souhaitons juste qu'il ouvre un centre de routage en Indonésie afin que les données ne soient pas routées vers le Canada», a-t-il déclaré à l'AFP.

Le Ministère souligne, dans un communiqué, ne «pas voir l'urgence» d'appliquer la même politique que les Émirats.

BlackBerry est extrêmement populaire dans l'archipel de 235 millions d'habitants, où 1,2 million d'appareils de la marque seraient en service, selon des statistiques professionnelles.

Le titre de RIM a clôturé à 53,06$ hier à Toronto, en baisse de 2,2%.