Est-ce que les firmes de génie-conseil font du lobbyisme ou pas ?

Le commissaire au lobbyisme André C. Côté, semble croire que oui, puisqu'il s'inquiète qu'aucune des 10 plus grandes firmes ne soit inscrite au Registre des lobbyistes.

À l'Association des ingénieurs-conseils du Québec (AICQ), on croit que les nombreuses exceptions prévues à la loi et certaines ambiguïtés expliquent pourquoi les firmes ne se sont pas inscrites et on demande des clarifications.

Le grand point à éclaircir ? La question du développement des affaires.

La loi exclut, en effet, toutes les représentations qui sont faites dans un but de faire connaître l'existence et les caractéristiques d'un produit ou service auprès d'un titulaire de charge publique.

Les firmes de génie-conseil considèrent que leurs activités cadrent plutôt dans l'optique du développement des affaires que dans le lobbying.

«Dans les activités d'une firme de génie-conseil, il y a beaucoup de communications avec les titulaires de charges publiques qui visent à faire du développement d'affaires. Ces gens-là réalisent de grands projets ensemble, ils travaillent en partenariat. Il ne faudrait pas que ces gens ne puissent plus se parler !», affirme Johanne Desrochers, présidente-directrice générale de l'AICQ.

Clarifications nécessaires

François P. Granger, président du Réseau des ingénieurs du Québec, croit que des clarifications seraient nécessaires pour bien distinguer les deux termes.

«On doit pouvoir savoir sans ambiguïté qui fait du développement d'affaires et qui fait du lobbyisme», affirme-t-il.

Il croit toutefois que les ingénieurs devraient mieux connaître la loi pour qu'ils sachent si elle s'adresse à eux et, si c'est le cas, qu'ils puissent s'inscrire sans attendre au Registre des lobbyistes.

«D'ailleurs, le Réseau s'est inscrit même si, parce que nous représentons des individus, nous n'y étions pas tenus. Pour nous, c'était important de le faire pour montrer l'exemple. La loi est là pour encadrer les gens qui font affaire avec les services publics et elle doit être respectée», affirme M. Granger.

Les firmes de génie-conseil expliquent également leur non-inscription au Registre par le fait que la loi exclut les activités réglementées par un appel d'offres public.

«Dans le secteur du génie-conseil, tous les contrats importants sont attribués par des appels d'offres publics», affirme Johanne Desrochers.

Rencontre avec le commissaire

Chose certaine, pour l'AICQ, des gestes concrets doivent être posés pour clarifier la loi et ses différentes interprétations possibles.

L'organisme a donc créé un groupe de travail composé d'avocats, d'ingénieurs et de représentants de firmes de génie-conseil pour se pencher sur le texte de loi et son interprétation.

«En étudiant la loi, plusieurs firmes de génie-conseil ont conclu qu'elles n'avaient pas à s'inscrire au registre. Toutefois, si je me fie aux différentes déclarations publiques du commissaire au lobbyisme, ce n'est pas son interprétation de la loi. Nous voulons donc le rencontrer pour lui expliquer la nature du travail quotidien des firmes de génie-conseil et parler de l'interprétation de la loi», explique Mme Desrochers.

Puisque l'AICQ a demandé, sans succès, une rencontre avec le commissaire l'automne dernier, elle réitère sa demande et espère cette fois qu'elle recevra une invitation.