Il était beaucoup question de paradis fiscaux dans l'organisation de Nil Lapointe. Ce nouveau scandale a d'ailleurs fait au moins une victime dans un paradis fiscal: la firme Alternative Wealth Management, située à Saint-Christophe-et-Niévès, dans les Caraïbes.

Selon nos informations, Alternative Wealth Management a placé des fonds dans l'organisation de Nil Lapointe pour le compte de clients. Le représentant d'Alternative est Sylvain A. Tellier, de La Prairie, indique un document qu'a obtenu La Presse Affaires.

Alternative transmettait régulièrement des courriels en anglais à ses clients relatant des problèmes de fonds bloqués en Europe. Dans le dernier courriel, on a annoncé le décès de Nil Lapointe et, conséquemment, la perte des fonds des investisseurs d'Alternative.

Nil Lapointe, rappelons-le, dirigeait un groupe d'investissement et de croissance personnelle baptisé Tanzanite. L'homme a mis fin à ses jours le 8 février, à Saint-Sauveur, selon le courriel transmis aux investisseurs de Tanzanite. Dans cette missive, Nil Lapointe reconnaît leur avoir menti en leur racontant que leurs fonds étaient bloqués depuis trois ans en Europe.

Aucun document ne nous a encore permis de savoir combien de victimes a fait cette nouvelle affaire. Cinq sources nous parlent de 150 à plus de 500 personnes. La somme en jeu pourrait varier de quelques millions de dollars à plus de 100 millions.

Luxembourg, Panama...

L'archipel Saint-Christophe-et-Niévès (en anglais St. Kitts Nevis) figure sur la liste grise des paradis fiscaux de l'OCDE parce qu'il n'offre aucune collaboration fiscale. Il n'est pas la seule mention d'un paradis fiscal dans l'affaire Nil Lapointe.

Un investisseur nous parle d'une banque du Luxembourg, sans compter la Banque de Chypre. Il soutient également que les dirigeants de Tanzanite «avaient trouvé un moyen de prendre des REER et de les investir dans le groupe en passant par Calgary puis le Panama. La somme minimale exigée était de 50 000$». Il n'a pas été possible de faire valider cette information par d'autres sources.

Le représentant d'Alternative, Sylvain A. Tellier, fait ses affaires par l'entremise de la société québécoise Services Stellcorp, dont il est le seul actionnaire. Nous avons laissé des messages à quelques reprises à M. Tellier, mais nos appels sont restés vains.

Au milieu des années 2000, Stellcorp s'affichait sur l'internet comme une entreprise offrant des services de placements extraterritoriaux. Sylvain Tellier figure d'ailleurs sur une liste de membres de l'Offshore Institute, en 2004. Cette liste de 160 membres que nous avons obtenue comprend 37 Canadiens, dont 12 Québécois.

Plus tard, Stellcorp semble être devenue une experte en marketing internet, bien que le registre des entreprises mentionne aujourd'hui «Services de gestion et d'administration».

Une personne fiable nous a indiqué que Sylvain Tellier était l'un des investisseurs directs de Tanzanite, l'organisation de Nil Lapointe. Peut-être que Sylvain Tellier agissait à titre d'intermédiaire de Tanzanite pour le compte d'investisseurs en utilisant Alternative/Stellcorp.

Chose certaine, Sylvain Tellier n'a aucun permis pour vendre des fonds, nous confirme l'Autorité des marchés financiers (AMF). Il n'a pas été possible de savoir combien Alternative comptait de clients ni leur lieu de résidence.

Dans le document que nous avons obtenu, Alternative et Sylvain Tellier font mention d'un «rendement pouvant atteindre 4% par mois». Le document met toutefois en garde les clients contre les risques de pertes substantielles d'investir dans le marché des matières premières. Une source nous indique avoir reçu ses intérêts en argent comptant de la part de Sylvain Tellier, comme ce fut le cas pour les clients de Tanzanite.

Le courtier sur son voilier

Par ailleurs, trois informateurs nous indiquent que le soi-disant génie qui plaçait des fonds dans les matières premières s'appelle Bernard Dumont, un Européen. L'homme travaillait de son voilier, nous dit-on, et avait mis au point un système de robot virtuel d'investissement présumé infaillible.

L'Autorité des marchés financiers (AMF) poursuit son enquête en interrogeant des victimes, selon nos informations. Fait étonnant, rien n'indique qu'elle n'ait encore fait de perquisitions dans les locaux ou les résidences de Nil Lapointe et de son associé Claude Hamel, ni bloqué de comptes bancaires.