EADS a mis à son tour la pression samedi sur les sept pays avec qui le groupe aéronautique européen négocie durement le financement des surcoûts du programme de l'Airbus de transport militaire A400M, réclamant une clarification avant la mi-février.

«Nous devons avoir une idée claire, pas détaillée, mais claire de la manière dont doit être traité l'A400M avant la fin de la semaine prochaine», a déclaré son président, Louis Gallois, devant des journalistes en marge de la conférence sur la sécurité de Munich, sorte de «Davos de la défense».

EADS, maison mère d'Airbus et les sept pays partenaires du programme (Allemagne, France, Espagne, Royaume-Uni, Belgique, Luxembourg et Turquie) sont engagés depuis des mois dans une âpre négociation pour partager les surcoûts d'un programme doté de 20 milliards d'euros mais notoirement sous-financé.

En dernier lieu, selon le ministre français de la Défense Hervé Morin, les sept partenaires ont donné à EADS jusqu'à la fin février pour boucler les négociations.

Des deux côtés de la table de négociation, on confie que les surcoûts sont de l'ordre de 5,2 à 5,3 milliards d'euros. Les Etats se sont déjà engagés à prendre à leur charge deux milliards d'euros et EADS, 800 millions d'euros.

La France a proposé jeudi le recours à un mécanisme d'avances remboursables, similaire à celui mis en oeuvre dans les programmes aéronautiques civils, pour un montant maximum d'1,5 milliard d'euros (dont 400 millions supportés par Paris) mais sans obtenir encore le ralliement de ses partenaires.

S'il était acquis -en dépit de réticences essentiellement britanniques et allemandes, dit-on de source proche du dossier-, resterait encore un milliard d'euros à trouver.

«L'écart n'est pas si grand et les efforts conjoints devraient permettre d'aboutir à une solution qui permettrait à tout le monde de déboucher sur un compromis acceptable», a estimé M. Gallois dans la capitale bavaroise, précisant qu'il reste aussi «à se mettre d'accord sur certains mécanismes financiers».

La chancelière allemande Angela Merkel et le président Nicolas Sarkozy ont exprimé de conserve jeudi à Paris leur volonté de parvenir «à une solution» pour ce programme dont leurs armées sont les principales clientes (60 appareils pour l'Allemagne et 50 pour la France, sur un total de 180 commandes).

Mme Merkel en a souligné «l'importance stratégique».

Pour EADS l'enjeu est double. A court terme, a expliqué M. Gallois, il s'agit de permettre au géant européen de l'aéronautique et de l'espace et à ses actionnaires de produire leurs comptes dans les temps.

A plus long terme, il en va selon lui de la «sauvegarde» des capacité du principal concurrent de l'américain Boeing à achever non seulement le programme de l'A400M mais aussi à poursuivre «dans de bonnes conditions» ses autres programmes militaires et civils.

L'un des objectifs de la discussion est d'éviter une dégradation de la note d'EADS qui aurait des conséquences directes sur l'ensemble des activités du groupe.

Les difficultés financières du programme découlent d'un développement plus long et complexe que prévu. Le premier avion ne sera pas livré avant le début 2013, à la France, avec au moins trois ans de retard sur le calendrier.

«A la tonne transportée, l'A400M est moins cher que le C130 Hercules et le C17 (deux avions américains) même avec les augmentations de prix que nous proposons», a cependant affirmé le patron d'EADS, concluant: «Je ne pense pas que les Etats fassent une mauvaise affaire».