Les mauvaises manières coûtent des milliards chaque année.

Dans leur ouvrage The Cost of Bad Behavior, paru en juillet dernier, les chercheuses Christine Pearson et Christine Porath constatent que les mauvaises manières ont un lourd prix en heures perdues ou mal employées, en départs précipités, en démissions.

Sans compter les contrats qui s'évaporent parce qu'on a indisposé son interlocuteur sans même s'en rendre compte.

 

Pas étonnant que les cours de bonnes manières soient devenus si populaires. Ginette Salvas, qui donne de la formation en étiquette depuis 1991, regrette d'ailleurs que les bons vieux cours de bienséance à l'école primaire aient disparu. «Résultat, les gens qui sortent maintenant de l'université n'ont à peu près pas de notions de courtoisie et d'étiquette, déplore-t-elle. Les gens sont gênés à la base, dans une assez grande proportion. Plutôt que de s'informer sur les manières d'agir dans telle ou telle situation, ils vont improviser.» Et c'est là que les fleurs du tapis commencent à s'accrocher aux chevilles.

Commençons par le commencement: la poignée de main. On peut faire une analyse psychologique complète (et généralement infondée) sur la seule base d'une poignée de main. Molle: pusillanimité, voire neurasthénie. Moite: faible résistance au stress. Du bout des doigts: peur de l'engagement. Pince-étau: volonté de puissance exacerbée.

Barack Obama est passé maître dans la poignée de main, observe-t-elle. Main tendue en avant, doigts bien alignés, pouce dressé à la verticale, regard dans les yeux, sourire. «Il se prépare, il est prêt à donner la main», constate Ginette Salvas.

La tradition voulait que la poignée de main donnée à une femme soit plus faible que celle échangée avec un homme. Cette nuance s'est éteinte avec l'égalité des sexes, qui impose désormais la parité. La poignée de main doit être sincère, mais brève. «Certains vont pomper l'eau tant qu'ils vous parlent», ironise Ginette Salvas.

La main gauche demeure le long du corps. Elle ne doit pas envelopper le poignet, le coude ou le dos de la main du vis-à-vis, à moins qu'il ne s'agisse de la «poignée de main électorale», qui veut témoigner un attachement particulier à cette main qui déposera éventuellement un bulletin de vote dans une boîte de scrutin.

Attention à la bise, qui peut souffler le froid. «Au Québec, on est becqueux, avise Ginette Salvas. Les hommes nous demandent s'ils sont obligés de la donner, et les femmes, si elles sont forcées de la subir. En affaires, la bise n'a pas sa place.»

L'étape suivante soulève une question éprouvante chez les gens d'affaires: que faire de ses mains dans un cocktail? Croisées dans le dos, jointes devant? «La position des mains, c'est le long du corps, décrète Ginette Salvas. Surtout pas dans les poches.» Elle a une solution qui recueille tous les suffrages: prenez un verre. «Ça occupe la main gauche. Avec l'autre, donnez la main.»

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