«C'est comme ça que ça se passe en finances. The sky is the limit

Telle est l'une des explications que donnait le fraudeur Vincent Lacroix à son jeune cousin embauché comme commis comptable sans expérience chez Norbourg, David Simoneau, lorsqu'il s'inquiétait des «modifications» faites aux registres des fonds des clients investisseurs.

De plus, alors qu'il comparaissait pour la deuxième journée à titre de «témoin repenti» au procès des cinq complices présumés de Lacroix, David Simoneau a fait allusion à une culture du secret qui se serait installée parmi la «petite clique» qui entourait l'ex-président de Norbourg.

«Il y avait des choses gardées secrètes chez Norbourg, comme la modification des rapports par Félicien Souka (ex-directeur informaticien chez Norbourg et parmi les coaccusés)», a-t-il indiqué.

Ces rapports modifiés étaient ceux provenant du gardien de valeurs des fonds Norbourg, la firme torontoise Northern Trust (NT).

Effacer des écarts

Encore hier, David Simoneau a expliqué en contre-interrogatoire par la défense que ces modifications visaient à effacer les «écarts» grandissants entre les rapports de NT et la comptabilité interne de Norbourg.

Aussi, a-t-il témoigné, il y avait des transferts de fonds des clients investisseurs qui étaient faits «à la demande de Vincent Lacroix et qu'il ne voulait pas voir apparaître.»

On sait depuis, comme l'a aussi relaté David Simoneau en Cour, que ces transferts de fonds servirent notamment à financer la croissance par acquisitions de Norbourg, ce qui était illégal.

Par ailleurs, alors qu'il a encore avoué hier avoir «commis des actes illégaux» chez Norbourg avec la préparation de faux documents, David Simoneau a nié avoir été mêlé à un «complot» afin de «voler les investisseurs».

«Je ne me baladais pas dans les couloirs avec Félicien Souka pour discuter de la modification de documents, même si ça m'inquiétait», a-t-il dit.

À quelques reprises, David Simoneau a fait une référence particulière à M. Souka ainsi qu'à un autre des cinq coaccusés: Serge Beugré, ex-directeur général de Norbourg.

Au point de susciter un inconfort parmi les avocats de la défense, qui ont affiché jusqu'à maintenant un front uni face à la Couronne malgré les intérêts particuliers de leur client.

Quant à Vincent Lacroix, David Simoneau a réitéré sa présomption de bonne foi de son cousin financier jusqu'à ce que la perquisition d'août 2005 fasse éclater la fraude.

«C'était de plus en plus énervant, mais quand j'en parlais à Vincent, il me rassurait», a-t-il témoigné.

«Je me disais qu'il ne pouvait pas faire une telle chose. Ce gars-là ne pouvait pas garder une telle confiance et bien dormir la nuit s'il avait fait une telle chose.»

Le procès des cinq ex-adjoints de Vincent Lacroix, qui a débuté il y un mois, se poursuit avec les témoignages d'un enquêteur de la GRC et d'une dirigeante de la firme Northern Trust.

Ils devraient expliquer à la Cour les mécanismes de transferts de fonds chez Norbourg, qui se sont avérés illégaux depuis.

Par ailleurs, en fin de journée hier, le juge Richard Wagner et les avocats de part et d'autre ont constaté la bonne marche du procès grâce, notamment, à l'admission de divers documents en preuve sans devoir en faire témoigner les auteurs.

Pareille démarche permet de soulager le tribunal et les jurés d'exposés parfois très techniques à propos de documents dont la teneur n'est pas contestée par la Couronne et la défense.

Les cinq coaccusés font face en tout à 722 chefs d'accusation de fraude, de fabrication de faux documents et de complot qui impliquent une volumineuse preuve documentaire.

Par conséquent, si cette preuve accélérée se maintient, le procès Norbourg pourrait aboutir à un verdict en décembre, avant l'ajournement des Fêtes.