Le Québec continue de se diriger vers une exploitation commerciale du gaz naturel du sous-sol des basses terres du Saint-Laurent.

Mais on y va plus lentement qu'on l'espérait en raison de la baisse draconienne du prix du gaz naturel et de la crise financière, ont précisé à La Presse plusieurs intervenants du secteur.

Depuis un an, le prix du gaz naturel a plongé de près de 60%, à moins de 3$US le million de BTU au Nymex, à New York. À ce prix, le rendement espéré d'un investissement dans l'exploration et l'exploitation de nouveaux gisements de gaz naturel est évidemment beaucoup moins alléchant.

Sans compter que la crise financière mondiale a resserré les conditions de crédit.

Du coup, Forest Oil, un des piliers de l'exploration gazière au Québec, a dû suspendre ses travaux d'exploration dans la province pour préserver ses liquidités.

En conséquence, la mise en production possible est reportée vers 2011-2012.

Les partenaires

Rappelons qu'au printemps 2008, les titres de Gastem, de Junex, de Questerre Energy et d'autres sociétés d'exploration gazières ont explosé en Bourse. Ces sociétés sont copropriétaires de grandes concessions gazières avec Forest Oil et Talisman Energy.

Ces deux producteurs gaziers reconnus et bien établis ont annoncé l'existence d'importants volumes de gaz naturel potentiellement exploitables dans les concessions situées sur la rive sud du Saint-Laurent, entre Québec et la vallée du Richelieu.

Si cela s'avérait, on parle d'au moins 4000 milliards de pieds cube de gaz. C'est 20 fois plus que la consommation annuelle dans la province... Ces gisements évalués à 100 milliards feraient donc du Québec un grand producteur et exportateur de gaz naturel!

Jusqu'à présent, les sociétés d'exploitation gazières ont démontré que l'emploi des techniques de fracturation permettrait d'extraire du gaz naturel contenu dans les shales de l'Utica.

Ces shales sont une couche de roche sédimentaire stratifiée, dense, peu poreuse et perméable. Elles sont entremêlées de matière organique (qui s'est transformée en gaz naturel) déposée en milieu marin ou aqueux il y a plus de 400 millions d'années.

Nouvelle technologie

On connaissait la présence de ce gaz depuis longtemps, mais la technologie traditionnelle ne permettait pas de l'extraire en raison de la faible perméabilité de la roche.

Or, une nouvelle technologie mise au point au Texas permet d'extraire du gaz des shales comme ceux de l'Utica. Cette technologie repose principalement sur le creusage de puits horizontaux et l'emploi de diverses techniques de fracturation de la roche pour stimuler la circulation du gaz.

La pause que s'accorde Forest Oil est loin d'avoir tué le projet d'exploitation des basses terres du Saint-Laurent.

Le duo Talisman Energy et Questerre Energy accélère même ses travaux dans l'Utica sur ce qui est la plus vaste propriété de ce champ gazier.

De leur côté, Junex et Gastem poursuivent la mise en valeur de propriétés autres que celles mises en commun avec Forest Oil. Chacune réalisera d'importants travaux d'exploration d'ici la fin de l'année.

D'ailleurs, même si l'enthousiasme boursier pour les petites sociétés gazières actives dans l'Utica s'est apaisé depuis l'an dernier, l'intérêt pour les shales de l'Utica est encore grand.

Selon Alain Lefebvre, directeur général des hydrocarbures et des carburants au ministère des Ressources naturelles et de la Faune, la superficie des concessions accordées a atteint un niveau record.

«Présentement, on peut dire que la superficie de permis pour la recherche de pétrole et de gaz naturel a presque doublé, à environ 10 millions d'hectares, par rapport à avril 2008. Les investissements en 2008 ont atteint un niveau record de 65 millions», a dit M. Lefebvre.

Exploration pétrolière

Le ministère est aussi plus actif dans les hydrocarbures.

Son budget prévoit des investissements de 4 millions, répartis sur deux ans, pour la cueillette de données géoscientifiques sur les territoires propices à la recherche de pétrole ou de gaz naturel.

Comme mesure incitative, Québec a accordé dans son dernier budget un congé de redevances de cinq ans pour tout puits de pétrole ou de gaz mis en production avant janvier 2011.

Quant à l'exploration pétrolière en milieu marin, les travaux sont suspendus au moins jusqu'en 2011. Ce délai permettra de compléter une étude sur l'impact environnemental que pourrait avoir l'activité d'exploration pétrolière ou gazière.

Le gouvernement du Québec prépare également une nouvelle loi destinée uniquement au secteur de l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures au lieu d'être soumis à la Loi sur les mines, comme c'est le cas présentement.

Finalement, la recherche de pétrole en Gaspésie recommence, après le règlement de la mésentente entre Pétrolia et Junex.

Pétrolia dirige maintenant les travaux en vue de délimiter ce qui pourrait être le premier gisement notable de pétrole brut au Québec.