« Ils m'ont piqué partout. Ici, ici, ici, ici, ici, ici. Partout », raconte Dominick Saviadjuk, 12 ans, en montrant les marques sur ses bras. « C'était correct, tant que sa mère était à ses côtés. Si je sortais pour fumer - même cinq minutes -, il demandait où était sa mère », ajoute celle-ci, Julie Ikey.

Le garçon serait devenu le premier enfant inuit à être évacué du Grand Nord accompagné d'un parent, samedi dernier, quelques jours après que le ministère de la Santé eut officiellement changé sa politique à cet effet. Les évacuations médicales en solitaire ont été dénoncées depuis le début de l'année par de nombreux professionnels de la santé.

Dominick Saviadjuk a été victime d'un accident de vélo vendredi soir dernier dans la communauté de Salluit, à l'extrême nord de la province. Ce village, comme les 13 autres du Nunavik, n'est pas relié par la route.

L'enfant a subi une blessure à la rate en tombant sur le sol. L'organe saignait et son ventre enflait. Il a été évacué à bord d'un avion Challenger le lendemain.

C'est l'infirmière de l'évacuation médicale qui a informé la famille que le jeune patient était le premier à pouvoir être accompagné d'un parent en vertu de la nouvelle politique. Malgré un appel au ministère de la Santé, La Presse n'a pas été en mesure de confirmer cette information, hier.

« C'est bien mieux maintenant. Comme parents, on connaît la santé de nos enfants. Les infirmières n'ont que l'historique sur papier. Ce n'est pas tout. » - Julie Ikey, mère de l'enfant évacué

Timide, le garçon confirme lui aussi qu'il était bien content d'être accompagné de sa mère et qu'il aurait eu peur en son absence.

La blessure à la rate du petit Dominick s'est finalement guérie d'elle-même et l'intervention chirurgicale prévue pour la réparer a été annulée. La famille espère retourner chez elle dans les prochains jours.

Ce n'était pas la première fois que la famille devait faire face à une évacuation médicale. Alors qu'il n'était qu'un bébé, Dominick Saviadjuk a été envoyé seul à Montréal pour un problème respiratoire, alors que sa soeur l'a été à la naissance parce qu'elle était très prématurée. Chaque fois, Julie Ikey a dû rester derrière.

« J'avais si peur de la laisser partir sans savoir si elle allait survivre ou non », a-t-elle confié. La petite a maintenant 3 ans et va bien.

« UNE VICTOIRE POUR LES ENFANTS »

À l'Hôpital de Montréal pour enfants, qui a reçu Mme Ikey et Dominick, le personnel se réjouissait de pouvoir compter pour la première fois sur l'aide d'un parent d'enfant évacué.

« Il était vraiment plus en sécurité : il était moins anxieux, il était plus calme. Il se sentait vraiment plus à l'aise en arrivant à Montréal : nos salles de trauma sont quand même impressionnantes, a rapporté l'infirmière Camille Coltriani. La maman faisait la communication. »

En entrevue téléphonique, sa collègue, la Dre Robin Petroze, fait la même analyse. 

« C'est une expérience très différente d'auparavant, à la fois du point de vue de l'équipe de trauma et du patient. Ça a fait une différence énorme dans le traitement de Dominick. » - La Dre Robin Petroze

Le pédiatre urgentiste Samir Shaheen-Hussain, à l'origine de la campagne pour faire changer la politique gouvernementale, s'est réjoui de cette première.

« La fin de cette pratique est certainement une victoire pour les enfants de toute la province. Des centaines d'enfants annuellement auront maintenant une main à tenir lors des évacuations aéromédicales, a-t-il affirmé dans une déclaration écrite. Il faut éliminer la discrimination systémique si des soins de santé équitables et dignes sont une priorité pour notre société. »