Hélène, 44 ans, a reçu un appel troublant de son médecin de famille, mardi : une anomalie a été découverte à son sein droit. La résidante de la couronne nord de Montréal doit subir une échographie pour mieux cerner le diagnostic. Mais incapable d'obtenir un rendez-vous rapidement dans une clinique privée de sa région, Hélène s'est résignée à aller porter son dossier dans un établissement de Cornwall, en Ontario.

« On est dans un vide actuellement. La quinzaine de cliniques privées où j'ai appelé au Québec ne prennent plus de rendez-vous. Et on ne sait pas quand ça reprendra. À l'hôpital, on est mis sur des listes d'attente. C'est affolant. On est échec et mat. C'est horrible d'être dans une telle situation », témoigne la dame.

Depuis le 29 décembre, les patients n'ont plus à payer pour obtenir des échographies faites par des radiologistes dans les cliniques privées au Québec. Mais ce nouveau règlement sème l'émoi chez les radiologistes. Ceux-ci déplorent entre autres le fait que le tarif des échographies faites par les radiologistes dans les cliniques privées ne soit pas encore fixé, faute de négociations avec Québec.

QUERELLE AVEC QUÉBEC

Estimant aussi que l'entente visant à assurer cette gratuité est mal ficelée, certains radiologistes refusent depuis le 29 décembre de prendre de nouveaux rendez-vous dans leur clinique privée. Pour obtenir une échographie, les patients doivent se tourner vers les hôpitaux, où les listes d'attente sont parfois longues.

Le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, accuse les radiologistes de prendre les patients en otage.

« Il n'y a aucune souplesse de leur part. Il y a une insensibilité des radiologistes face aux patients », dit Gaétan Barrette, ministre de la Santé.

Il affirme que « c'est aux radiologistes de remanier leur enveloppe pour dégager les fonds ». Le ministre ajoute que même si le tarif des échographies n'est pas encore fixé, les remboursements se feront rétroactivement et que les radiologistes devraient donc poursuivre leurs activités.

Les radiologistes reprochent pour leur part au ministre Barrette de ne pas vouloir s'asseoir avec eux pour trouver une solution au problème. La Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ) ne fait quant à elle pas confiance au ministre et souhaite une entente écrite pour clarifier rapidement la situation.

« JE NE PEUX PAS ATTENDRE UN AN »

Pour Hélène, peu importe où se trouve la solution, il est inacceptable que les patients du Québec fassent ainsi les frais d'une querelle entre Québec et les radiologistes. « Je ne peux pas attendre un an que ça se règle. C'est inhumain de nous faire ça. On nous a promis que les échographies seraient gratuites au privé. Mais dans le réel, ce qui se passe, c'est qu'on n'a juste plus du tout accès aux échographies... », dit-elle.

Une rencontre de négociations a eu lieu en fin de journée hier entre Québec et les radiologistes. Au moment de publier, l'issue restait inconnue.

En fin d'après-midi, le ministre Barrette n'écartait toutefois pas la possibilité de fixer les tarifs des échographies en remaniant unilatéralement l'enveloppe des radiologistes. Une possibilité permise par la loi 20, selon lui. « C'est ce qui va arriver bientôt si la négociation n'avance pas », a-t-il dit.

Les frais accessoires abolis dès le 26 janvier

Gaétan Barrette a annoncé hier que les frais accessoires pour des services couverts par l'assurance maladie seraient abolis le 26 janvier. Seuls certains frais de transport d'échantillon pourront désormais être facturés aux patients. Reprochant au ministre de ne pas encore avoir conclu d'entente sur la mise en oeuvre du règlement, la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ) laisse planer la fin de certains services en cabinet. « Comme dans le dossier de l'échographie, le dossier des frais accessoires est traité de la même façon : pas négocié, pas organisé, sans prévoir tous les enjeux et les conséquences que ça va avoir sur les patients », a déploré la présidente Diane Francoeur.

De son côté, la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ) a fait une proposition sur laquelle le ministre ne s'est toujours pas prononcé. Elle souhaite par exemple que la somme versée par la Régie de l'assurance maladie du Québec à un médecin pour une vasectomie passe de 100 à 250 $ - le patient devait payer la différence auparavant, donc environ 150 $. La FMOQ assure qu'il n'y a aucun coût supplémentaire pour l'État.