Les trampolines passent un mauvais quart d'heure cet été. Début août, une étude américaine a sonné l'alarme au sujet de l'explosion du nombre de blessures liées à cette activité, surtout à cause de la prolifération des parcs de trampolines, des centres de jeux pour enfants. Et à la fin du mois, le ministère de la Santé du Québec a conclu que les parcs de trampolines affichaient un taux de blessures comparable aux stations de ski alpin.

« Le nombre de blessures de trampoline a décuplé en 10 ans », explique Kathryn Kasmire, pédiatre à l'Université du Connecticut, qui est l'auteure de l'étude publiée dans la revue Pediatrics.

« C'est essentiellement à cause des parcs de trampolines, estime Mme Kasmire. Nous en avons deux à proximité de nos urgences et nous avons été frappés de voir l'augmentation du nombre de patients depuis leur ouverture. Il faut un meilleur encadrement, même si on ne parle généralement que de foulure ou de blessure [mineure]. »

Le rapport du ministère de la Santé, publié le 24 août, estime que la moitié des blessures de trampoline ayant nécessité une visite aux urgences pédiatriques implique une foulure, et l'autre moitié, une fracture.

En 2015, Radio-Canada a rapporté qu'un jeune homme de Québec était devenu quadriplégique en se blessant à un centre iSaute, l'entreprise qui gère trois des quatre parcs de trampolines du Québec. Le premier parc de la province a ouvert ses portes en 2013.

Sur la base des visites aux deux urgences pédiatriques de Montréal, le rapport du Ministère évalue que le taux de blessures, 1,5 par 1000 visites, est semblable à celui du ski alpin. Par contre, la gravité des blessures est plus importante en ski alpin : 0,24 blessure par 1000 visites ont nécessité une ambulance, contre 0,13 par 1000 visites pour le trampoline.

« Nous avons collaboré avec l'équipe qui a fait le rapport, et les recommandations reflètent ce que nous faisons déjà », dit la copropriétaire du réseau iSaute, Natalie Lundquist, qui a ouvert son premier parc de trampolines aux États-Unis il y a près de quatre ans.

« L'an dernier, nous avons engagé un trampoliniste professionnel pour former nos employés aux techniques de trampoline, pour détecter plus facilement les jeunes qui ne font pas ça correctement. »

INQUIÉTANT

À l'Hôpital de Montréal pour enfants, la directrice de la traumatologie, Debbie Friedman, s'inquiète des trampolines depuis près de 20 ans.

« En 1997, l'un de mes patients est mort en tombant du trampoline dans une école de la Rive-Sud, dit Mme Friedman. À mon avis, on ne devrait jamais installer un trampoline dans sa cour, tout comme il ne viendrait jamais à l'idée de parents d'y installer des barres asymétriques. »

Mme Friedman voit entre 80 et 90 blessures de trampoline privé par an. Les blessures dans les parcs de trampolines augmentent régulièrement, passant de 45 en 2014 à 60 en 2015. « Cette année, on en a déjà presque 40 », dit Mme Friedman.

Une blessure sur cinq survient chez un enfant de moins de 1 an. « Souvent, les parents vont amener le bébé avec eux sur le trampoline, dit Mme Friedman. C'est le gros problème : les blessures surviennent généralement quand deux personnes entrent en collision. »

L'étude de Pediatrics propose d'ailleurs de limiter à une seule personne à la fois l'utilisation du trampoline. Le rapport du Ministère ne va pas aussi loin, proposant plutôt de respecter le nombre maximal de participants suggéré par le fabricant.

Chose certaine, les centres de jeux pour enfants ne sont pas tous tentés par le trampoline, malgré la popularité grandissante des centres ouverts depuis trois ans.

« On a vu les ambulances partir des parcs de trampolines et on a décidé de ne pas en avoir », indique Jean-François Racicot, du centre de jeux Cache-à-l'eau de Boucherville, qui est ouvert depuis 1995.