La caféine empêche la réparation de l'oreille après un événement où elle a été soumise à un grand bruit, selon une nouvelle étude montréalaise. Ces résultats, qui doivent encore être validés chez l'humain, pourraient avoir des conséquences cliniques importantes, puisqu'un jeune adulte sur six a des pertes d'ouïe temporaires qui pourraient devenir permanentes s'il prend trop de café.

« Chez nos sujets animaux, ceux qui prenaient du café avaient une réduction de l'ouïe de 30 à 40 décibels, ce qui correspond à une perte modérée », explique Faisal Zawawi, oto-rhino-laryngologiste à McGill, qui est l'auteur principal de l'étude publiée dans la revue JAMA Otolaryngology. « Normalement, si la perte temporaire dure plus que 48 à 72 heures, la probabilité d'une perte permanente est beaucoup plus élevée. Nous avons suivi les animaux pendant deux semaines. »

La quantité de caféine ingérée par les cobayes correspondait à 12 cafés pour un humain et le bruit, à 110 décibels, « l'équivalent d'un concert rock très très fort », dit le Dr Zawawi. « Ce sont des chiffres très élevés. Il faut voir s'il y a un effet avec des niveaux moindres de café et de bruit. »

Les cobayes qui n'avaient pas reçu de caféine ont complètement recouvré leur ouïe. La caféine était administrée par injection une fois par jour, pendant les deux semaines précédant l'événement bruyant.

RÉSULTATS À CONFIRMER CHEZ LES HUMAINS

La caféine seule ne nuisait pas à l'ouïe, seulement à la récupération après une exposition à un très grand bruit. « On croit comprendre le mécanisme, dit le Dr Zawawi. Quand la cochlée de l'oreille interne est exposée à un grand bruit, ses vaisseaux sanguins se dilatent pour amener plus de sang. Or, la caféine est un vasoconstricteur. C'est pour ça qu'elle peut augmenter légèrement la pression. La caféine interfère aussi avec un échange de calcium entre les cellules de l'oreille qui fait partie de la récupération après un bruit intense. Nous avons examiné la cochlée des animaux au microscope après l'expérience et nous avons vu des indices de ces deux phénomènes. Il nous faudra confirmer cela avec une expérience portant précisément là-dessus. »

Il faut maintenant confirmer ces résultats sur les humains, avec des études populationnelles, probablement chez des populations plutôt exposées aux grands bruits de nature industrielle. Le groupe dont fait partie le Dr Zawawi fait depuis quelques années des études sur les effets de différentes substances, souvent des médicaments, sur l'ouïe.