Une étude canadienne montre qu'on peut réduire de 40 % les prescriptions d'antipsychotiques dans les CHSLD, ce qui permet de diminuer de 20 % le nombre de chutes entraînant une hospitalisation, avec une formation simple et peu coûteuse. Les antipsychotiques sont souvent utilisés abusivement dans les CHSLD et entraînent de l'atonie musculaire et affective.

L'étude, menée par la Fondation canadienne pour l'amélioration des services de santé (FCASS), a permis d'éliminer 36 % des prescriptions d'antipsychotiques en CHSLD et de réduire les doses dans 18 % des cas. Le nombre de chutes ayant nécessité une hospitalisation a diminué de 20 %. Le programme a été testé dans 56 CHSLD de sept provinces, dont la moitié appliquaient la nouvelle approche. Le Québec n'y a pas participé.

« L'idée est de travailler avec la famille et avec tous les membres de l'équipe soignante, même les préposés aux bénéficiaires et à l'entretien », explique Armand Boudreau, un travailleur social qui a dirigé des établissements de services sociaux au Québec pendant plus de 20 ans et qui organise maintenant l'application de la nouvelle approche pour les antipsychotiques en CHSLD au Nouveau-Brunswick. « On veut comprendre le patient. Par exemple, on m'a rapporté qu'un monsieur recevait des antipsychotiques parce qu'il était confus et agité. Il était aussi devenu incontinent. Il s'est avéré qu'il devenait agité quand il avait envie. On a pu enlever et les antipsychotiques et les couches. »

Un expert de l'Université Laval affirme que le Québec devrait s'inspirer du rapport et est en retard par rapport au reste du Canada. « Ça fait quatre fois que Santé Canada lance des avertissements sur cette utilisation abusive des antipsychotiques », dit Philippe Voyer, qui a trouvé des chiffres sur la surprescription d'antipsychotiques en CHSLD dans le cadre de recherches sur la démence. « Nous sommes les champions canadiens des prescriptions d'antipsychotiques. Je dis bravo, j'espère que le Québec embarquera. La même approche a fonctionné aux États-Unis et en Angleterre. »

Selon M. Voyer, aux États-Unis, entre 14 et 22 % des personnes âgées atteintes de démence prennent des antipsychotiques, contre 30 à 50 % au Québec, avec des pointes à 60 % dans certains établissements. Le taux de prescription chez les personnes âgées est deux fois plus élevé au Québec qu'en Ontario.

Faut-il plus de personnel ? « Non, seulement de la formation au début, c'est simplement un changement de paradigme », dit M. Boudreau.

Les directeurs de CHSLD vont-ils accepter de financer des formations qui réduisent les hospitalisations pour chutes, des coûts qu'ils n'ont pas à assumer ? « Je sais que de l'extérieur, les gens ont l'impression que les directions n'ont pas à coeur le bien-être des patients, dit M. Boudreau. Mais sur le terrain, je ne vois pas ce genre d'attitude. »

Maureen O'Neil, présidente de la FCASS, précise que l'approche a été formellement adoptée par la Colombie-Britannique et le Nouveau-Brunswick. La FCASS a maintenant un programme d'amélioration du traitement à domicile de l'obstruction pulmonaire chronique pour éviter les hospitalisations, qui est notamment piloté depuis le Québec.