Le Groupement provincial de l'industrie du médicament (GPIM) craint que le déplafonnement des allocations professionnelles des pharmaciens, qui pourrait entrer en vigueur dès le mois de février, « n'ouvre la porte à des problèmes de conflits d'intérêts ». De son côté, l'Ordre des pharmaciens du Québec affirme « se questionner » à ce sujet et tiendra une rencontre aujourd'hui pour éclaircir la question.

En juin, le gouvernement a signé une entente avec les pharmaciens qui prévoit des coupes d'honoraires de 133 millions par année pendant trois ans. Pour permettre aux pharmaciens d'absorber ces coupes, Québec a annoncé le déplafonnement sur trois ans de leurs allocations professionnelles.

Aussi appelées « ristournes », ces allocations sont des sommes ou des avantages accordés par des fabricants de médicaments génériques aux pharmaciens. Ces sommes doivent être dépensées dans les pharmacies. Depuis 2012, le plafond des allocations professionnelles des pharmaciens est gelé à 15 % au Québec.

Pierre Morin, président du GPIM, qui représente des PME fabricantes de médicaments génériques au Québec, croit que le déplafonnement représente un risque pour l'industrie. « Déjà, on voit des compagnies parler d'allocations atteignant 50 %, voire 60 %. Les PME ne pourront absorber de tels montants », dit-il.

Hier, l'Association canadienne du médicament générique a également publié une étude qui s'inquiète de l'impact du déplafonnement des allocations sur la rentabilité des fabricants de médicaments génériques.

Problèmes éthiques

M. Morin croit également que le déplafonnement soulève « de nombreuses questions éthiques ». En effet, depuis l'été dernier, les pharmaciens peuvent faire de nouveaux actes, comme renouveler des ordonnances et prescrire des médicaments pour des conditions mineures.

« Les pharmaciens seront portés à prescrire les molécules qui leur rapportent le plus de ristournes. Je suis abasourdi que personne ne se soit posé la question avant », dit-il.

Le conseil d'administration de l'Ordre des pharmaciens se réunira aujourd'hui à ce sujet et n'a pas voulu commenter la question, hier.

Jean Bourcier, directeur général de l'Association québécoise des pharmaciens propriétaires, croit que ces craintes ne sont pas fondées. « Huit provinces ont levé leur plafond d'allocations professionnelles et les fabricants de médicaments génériques y sont toujours », note-t-il.

M. Bourcier ajoute que les nouveaux actes que peuvent faire les pharmaciens sont « encadrés par le code de déontologie de la profession ». « Le gouvernement possède aussi un registre de toutes les allocations. C'est plus encadré que nulle part au Canada », note M. Bourcier.

Il ajoute que parmi les nouveaux actes, les pharmaciens peuvent renouveler une ordonnance. « Mais celle-ci est déjà existante. On ne peut pas la changer », dit-il. Les pharmaciens peuvent aussi prescrire des médicaments pour certaines conditions mineures. « Mais souvent, il n'y a pas de médicaments génériques pour ça », précise-t-il.