Le ministre Gaétan Barrette a émis jeudi une directive à l'ensemble du réseau de la santé pour mettre fin au marché noir des bains pour personnes âgées dans les CHSLD. Une pratique qui avait cours dans plusieurs régions et qui était endossée par des dirigeants.

La Coalition avenir Québec a révélé mercredi que dans des CHSLD des Laurentides, des préposés aux bénéficiaires offrent leurs services en dehors des heures de travail et en échange d'argent comptant pour donner un deuxième bain par semaine aux personnes âgées.

Après vérifications, « malheureusement, je suis forcé de constater que ça existe et à une plus grande échelle que je le voudrais », a affirmé Gaétan Barrette lors d'une mêlée de presse jeudi. Ce service « au noir » existe « dans plus qu'une région ».

« Le problème premier qui existe ici, et qui sera réglé dès aujourd'hui, est celui, un, du marché, et, deux, du conflit d'intérêts que les employés ont face à la clientèle qui est par définition vulnérable », a soutenu M. Barrette.

« Une directive a été envoyée au réseau au complet, a-t-il ajouté. Les 33 (dirigeants) ont eu la directive formelle d'arrêter cette pratique ».

Les employés ne devraient pas avoir de sanction, sauf de la part de Revenu Québec. Les gains, en argent comptant, n'étaient pas déclarés. « Sur le plan légal, ce qui est attaquable, c'est la partie travail au noir », a dit le ministre.

Il a laissé entendre que les dirigeants qui ont endossé le marché noir - comme on l'a constaté dans une lettre de la commissaire aux plaintes des Laurentides - ne seront pas punis. De toute façon, « les dirigeants passés ne sont plus là », en raison de l'adoption du projet de loi 10 sur la réorganisation du réseau, a-t-il plaidé.

Si des préposés offrent leurs services, c'est « parce qu'il y a une demande », a reconnu M. Barrette. Mais les services de l'État sont « adéquats » à ses yeux. « Actuellement, les soins d'hygiène de base requis par la population sont donnés » - comme un bain par semaine.

« Je l'ai fait moi-même, a-t-il ajouté. J'ai fait ça dans ma vie, j'ai tout fait dans le système de santé. Moi, j'ai lavé du monde à la débarbouillette dans un lit, et je peux vous garantir qu'ils étaient aussi propres que dans un bain. L'enjeu, ce n'est pas le bain hebdomadaire. L'enjeu, c'est l'hygiène tous les jours. Et ça, avez-vous rapporté récemment dans vos médias des situations où l'hygiène était un problème ? »

En novembre dernier, on faisait les manchettes avec l'histoire d'une dame de 85 ans privée de bain depuis neuf mois dans un CHSLD de Montréal. Le ministre avait alors jugé la situation inacceptable.

Gaétan Barrette a rappelé que « les usagers ou les familles ont le droit de solliciter des services payants » et faire appel à « une entreprise d'économie sociale pour donner des bains supplémentaires payants ». Les membres de la famille peuvent aussi donner des bains, a-t-il ajouté.

En vertu de la « responsabilité de l'État », « les services d'hygiène de base doivent être donnés tous les jours, et c'est le cas. Maintenant, si les gens désirent avoir plus, ils ont le loisir de le faire ».

À l'Assemblée nationale jeudi, le ministre a affirmé qu'il n'était pas au courant de l'existence du marché noir des bains avant les révélations de la CAQ. Le député caquiste François Paradis a révélé que la Fédération des préposés aux bénéficiaires du Québec a alerté le gouvernement par écrit dès 2011 au sujet de l'existence du marché noir. Le gouvernement était dirigé par Jean Charest et le ministre de la Santé était Yves Bolduc.