Alors que le réseau de la Santé se dit fin prêt à affronter une éventuelle épidémie de fièvre Ebola, les ambulanciers de Montréal affirment ne pas avoir l'équipement adéquat pour traiter d'éventuels malades sans risquer d'être contaminés à leur tour.

Même leurs combinaisons les plus sophistiquées, obligatoires dans toutes les ambulances de la province, ne seraient pas prévues pour protéger ceux qui les portent contre une maladie comme la fièvre Ebola, a découvert le syndicat des ambulanciers en consultant le fabricant.

«Le réseau n'est pas prêt», croit le président du Syndicat du préhospitalier, Réjean Leclerc, qui représente les ambulanciers de Montréal et de Laval. «Ils peuvent bien isoler les patients une fois à l'hôpital, c'est nous qui sommes en première ligne. Si nous ne sommes pas bien protégés, on va contaminer des gens.»

Dans des directives envoyées récemment aux services préhospitaliers de la province, le ministère de la Santé demande que les ambulanciers prenant en charge des patients qui présentent des symptômes du virus portent gants, masque, lunettes et blouse.

Protection insuffisante

Une protection largement insuffisante, estime M. Leclerc. «La blouse, ça peut fonctionner à l'hôpital, quand le patient est dans son lit. Mais nous, on doit le prendre. Le soulever. La blouse n'est pas imperméable. S'il y a du sang ou du vomi, ça va passer à travers.»

Pour une protection accrue, chaque ambulancier dispose d'une combinaison de type Tyvek, du nom de son matériau. Il s'agit de l'une de ces grandes combinaisons blanches munies d'un capuchon qu'on voit parfois lors d'opérations particulièrement risquées.

Hier, le syndicat du préhospitalier a contacté le fabricant de ces combinaisons afin de savoir s'il pouvait recommander à ses membres de les porter à la place des blouses.

Sa question: quel est l'équipement idéal pour se prémunir contre la fièvre Ebola? Le fabricant a suggéré une autre combinaison que celle dont disposent actuellement les paramédicaux.

Selon la fiche technique du survêtement Tyvek, ce dernier n'est effectivement pas conçu pour protéger celui qui le porte contre les liquides biologiques. Il offre bien un certain degré de protection, mais seulement si l'exposition à du sang, des vomissures et d'autres liquides est minime.

«S'il y a une exposition à des quantités modérées ou importantes de fluides corporels», lit-on, le fabricant conseille l'utilisation d'un autre type de combinaison.

Cela inquiète beaucoup Réjean Leclerc. «On s'interroge. Est-ce que notre équipement nous protège vraiment? Quand on voit les habits qu'ils portent en Afrique pour gérer la pandémie, on voit que c'est pas mal plus que nous.»

L'attachée de presse du ministre Gaétan Barrette, Joanne Beauvais, se fait rassurante. Selon elle, le réseau est équipé pour prendre adéquatement en charge d'éventuels cas. «On m'a assuré que tout était prêt. On a l'équipement nécessaire au Québec», dit-elle. Elle assure que le Ministère surveille la situation de près afin d'assurer la sécurité de la population et des professionnels.

En conférence de presse, le Dr Barrette a rappelé que les risques de voir de véritables cas au Québec sont faibles. «Tous les centres hospitaliers du réseau sont en mesure de rapidement prendre en charge et placer en isolement toute personne susceptible d'être infectée par le virus», dit-il.

Fausse alerte

Dans le réseau, l'inquiétude persiste. Hier, le transport en ambulance d'une femme qui présentait des symptômes s'apparentant à l'Ebola et qui revenait de voyage vers l'urgence de l'hôpital Saint-Luc a semé l'émoi. Les paramédicaux ont posé des questions sur les risques de contamination. Un superviseur est allé à leur rencontre. Urgences-santé a plus tard assuré qu'il s'agissait d'une fausse alerte.

«Les gens sont plus nerveux. L'inquiétude qu'on a, c'est qu'on ne soit pas capables d'avoir l'information le jour même [sur l'état du patient]», dit M. Leclerc.

Cette fausse alerte s'ajoute au cas d'un autre patient isolé dans un hôpital de Montréal dont l'état de santé était jugé comme suspect jusqu'à hier soir.

Hier matin, le Ministère a annoncé que ce malade revenait d'un séjour en Guinée et qu'il était dans un hôpital de la métropole. L'Agence de la santé de Montréal n'a pas voulu divulguer le nom de l'hôpital où se trouve le patient. Une analyse du Laboratoire national de microbiologie de Winnipeg dont les résultats ont été dévoilés à 21h30 s'est finalement révélée négative.

Disant agir «par souci de transparence», le ministère de la Santé divulgue depuis hier sur son site internet le nombre de patients suspectés de souffrir de fièvre Ebola dans la province.

- Avec Ariane Lacoursière