Les malades en phase terminale aux prises avec des douleurs intolérables pourront obtenir l'aide d'un médecin pour abréger leurs souffrances, a décidé hier l'Assemblée nationale dans un vote qualifié d'«historique».

Le vote fortement majoritaire marque la fin d'un débat entamé en 2009 et mené de front par la députée péquiste Véronique Hivon, devenue le visage public du projet.

«Mourir dans la dignité, c'est mourir avec le moins de souffrances possible, mais c'est surtout mourir en ayant le sentiment qu'on est encore la personne qu'on a été pendant toute notre vie, a fait valoir Mme Hivon juste avant de voter pour le projet de loi. Permettre à quelqu'un jusqu'à son dernier souffle d'être la personne qu'il ou elle a été pendant toute sa vie, c'est le plus grand cadeau qu'on peut faire.»

Vers 15h, 94 députés se sont levés un à un pour exprimer leur appui au projet, issu d'une réflexion non partisane qui s'est faite dans une certaine sérénité.

Quelques secondes plus tard, 22 autres élus - tous des libéraux - se sont levés pour s'y opposer. On comptait notamment dans ce camp les ministres Christine St-Pierre, Robert Poëti et Pierre Arcand, ainsi que la vice-première ministre Lise Thériault, illustrant la division profonde du gouvernement sur cette question.

«Je ne peux me convaincre de penser qu'il n'y aura pas des situations où un individu ne sera pas influencé indûment», a plaidé le ministre Pierre Moreau avant de voter contre le projet de loi.

Neuf députés étaient absents.

Le premier ministre a appuyé le projet de loi. Il a souligné que le gouvernement devait rester attentif à son application pour éviter les dérapages. «Assurons-nous de maintenir une vigilance extrême», a dit Philippe Couillard avant de voter.

Consensus, mais pas unanimité

Les deux députés qui présentaient le projet de loi, Mme Hivon et le ministre de la Santé Gaétan Barrette, se sont dits persuadés que le projet fait «consensus» au sein de la population.

«On a un projet de loi qui ne fait pas l'unanimité [...] mais qui reçoit une très large adhésion et un très fort consensus», a dit la députée péquiste.

M. Barrette a ajouté qu'il fallait se méfier de l'unanimité, néfaste pour les échanges d'idées. La population est maintenant prête, selon lui, ce qui n'était pas le cas «il y a 20 ans ou il y a 30 ans».

D'autres ne sont pas de son avis.

Le Collectif des médecins contre l'euthanasie, qui dit compter 600 membres, a condamné «une grave trahison des malades et des personnes en fin de vie, puisque le fait de tuer un patient qui va mourir n'est pas un soin, mais un homicide».

L'organisation promet que la nouvelle loi sera rapidement contestée devant les tribunaux. Elle voit une contradiction claire entre les dispositions du Code criminel et les gestes que ferait un médecin pour mettre fin à la vie d'un patient.

Le ministre de la Santé ne craint pas de voir sa loi cassée par les tribunaux. «S'il y a une contestation, je suis très confiant qu'on va la gagner», a-t-il assuré.

Le gouvernement a 18 mois pour mettre en oeuvre les dispositions de la loi.