La Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ) estime que le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, n'est pas en position de conflit d'intérêts dans le cadre des négociations en cours sur l'étalement d'une hausse de salaire qu'il a négociée.

La présidente de la FMSQ, Diane Francoeur, a déclaré mardi dans une entrevue qu'elle est à l'aise d'avoir comme interlocuteur M. Barrette, qui dirigeait l'association jusqu'en mars dernier.

«Il n'est pas du tout en conflit d'intérêts, alors lui, il a une job à faire et moi aussi, a-t-elle dit. On doit s'entendre sur un montant et puis c'est là qu'on va finir par arriver. Mais vous pouvez lui demander pour voir ce qu'il en pense.»

Selon Mme Francoeur, M. Barrette ne dispose pas d'informations privilégiées qui pourraient l'avantager dans ses négociations avec la FMSQ.

«Il n'a d'informations privilégiées plus qu'un autre, dans le sens que les montants qui sont en jeu, il les connaissait», a-t-elle dit.

Le Parti québécois ainsi que la Coalition avenir Québec (CAQ) estiment pourtant que le président du Conseil du trésor, Martin Coiteux, devrait jouer un rôle plus important dans le dossier afin d'éviter les risques de conflit d'intérêts.

M. Barrette, qui a empoché une prime de départ de 1,2 million $ lorsqu'il a quitté la FMSQ pour se faire élire député libéral, en avril, s'est lui-même défendu en faisant valoir le mécontentement de ses anciens collègues pour prouver qu'il ne les ménage pas.

En raison des difficultés à rétablir l'équilibre budgétaire, le gouvernement veut étaler sur un plus grand nombre d'années les augmentations d'environ 1 milliard $ prévues pour 2013-2014 à 2015-2016. Ces hausses ont été négociées dans le cadre d'une entente conclue en 2006 par M. Barrette, lorsque le premier ministre Philippe Couillard était ministre de la Santé.

Mme Francoeur a affirmé que M. Barrette a l'avantage de connaître les enjeux liés aux ententes conclues avec les médecins, ce qui évite d'avoir à les lui expliquer.

«C'est sûr qu'il y a des dossiers qu'il connaît, évidemment, mais nous on négocie avec lui comme on a négocié avec les autres», a-t-elle dit.

La présidente de la FMSQ a expliqué cependant que le regroupement, qui rejette tout étalement des hausses prévues sur une période qui irait jusqu'en 2029, savait qu'il n'y aurait pas de traitement de faveur pour ses membres.

«On nous demande d'ouvrir une entente alors que le premier ministre avait dit qu'il ne le ferait pas, alors c'est bien évident qu'on ne va pas aller à l'abattoir se faire massacrer, a-t-elle dit. On se défend comme on l'a toujours fait.»

Mme Francoeur a expliqué que la FMSQ a fait une contre-offre au gouvernement et attend une réponse.

«On a toujours été d'accord d'étaler, ça fait déjà trois fois qu'on se prête à l'exercice», a-t-elle dit.

La FMSQ croit qu'il existe encore une marge de manoeuvre pour atteindre l'objectif fixé par M. Barrette, qui souhaite une entente avant le dépôt du budget le 4 juin.

«Tant que le budget ne sera pas déposé, il y aura toujours un moyen de faire avancer le dossier», a dit Mme Francoeur.

Le chef péquiste intérimaire Stéphane Bédard, ancien président du Conseil du trésor, s'est inquiété de constater que la FMSQ ne voit pas de conflit d'intérêts dans la situation actuelle de M. Barrette.

«S'il ne dispose pas d'informations privilégiées, qui en a? Il est au coeur des négociations, a-t-il dit. J'ai eu la chance de m'assoir avec lui pour regarder les possibilités de prolonger et de reporter ces hausses et c'était le principal intervenant.»

Le chef caquiste François Legault a insisté sur la prime de départ que M. Barrette a reçue lorsqu'il a quitté la FMSQ.

«Il est dans une position très près d'un conflit d'intérêts, pour ce qui est de négocier de l'autre bord de la clôture et d'avoir une bonne entente pour l'ensemble des Québécois», a-t-il dit.