Les proches aidants ont de multiples visages, mais demandent tous la même chose : du soutien, du répit et un meilleur accès à l'information. Deux témoignages.

Mélanie Guérin

« Née pour aider »

Les parents de Mélanie Guérin étaient déjà âgés lorsqu'elle est venue au monde. Elle avait à peine 6 ans quand son père a fait un AVC. Dès son jeune âge, elle a appris à cuisiner, à faire le lavage et à veiller sur ses parents.

Maintenant âgée de 35 ans, elle vit toujours avec sa mère et s'occupe d'elle. « Même si j'ai de la misère, je garde ma mère. Pas question de la placer », lance Mme Guérin, qui a elle-même reçu un diagnostic de fibromyalgie récemment.

Sa mère a été dépressive pendant plusieurs années. Aujourd'hui, elle a une médication et se porte mieux. Mme Guérin a amené à la maison des chats, des chiens et un perroquet. « Ma mère s'en occupe, elle leur parle, c'est comme de la zoothérapie. Ça lui fait du bien », affirme la jeune femme.

Sa mère étant encore en mesure de se déplacer, les deux sortent faire les commissions ensemble. « Elle aime m'accompagner, ça fait partie de nos sorties. »

Mme Guérin aime cuisiner et s'assure que sa mère a des repas sains qui permettent de contrôler son diabète. L'alimentation est importante, affirme-t-elle.

Très jeune, Mme Guérin est celle qui a veillé sur ses parents. C'est son choix. « On dirait que j'ai été élevée pour ça. »

Adolescente, elle se dépêchait de venir préparer les repas après l'école. Par la suite, elle a dû travailler plutôt que de continuer ses études, pour aider ses parents, dit-elle.

Quand sa mère a subi une opération, c'est elle qui s'est occupée de lui donner son bain pendant plusieurs semaines.

Elle a aussi pris soin de son père pendant plusieurs années. En 2009, elle s'est résignée à lui trouver une place dans un CHSLD. Il était devenu violent et avait un début de démence. Elle n'y arrivait pas.

Il est mort six mois plus tard. Mme Guérin croit que si son diabète avait été mieux contrôlé, il ne serait pas parti aussi vite.

Elle le regrette encore aujourd'hui et se promet de s'occuper de sa mère aussi longtemps qu'il le faudra. « Je suis devenue sa canne de vieillesse. »

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Roseline Rico

Prise est prise en sandwich entre deux générations

Roseline Rico est le portrait type du proche aidant : une femme qui travaille, avec un enfant à la maison et une mère âgée en perte d'autonomie. Entre les deux, il lui arrive d'être à bout de souffle.

Mme Rico a commencé à veiller sur ses parents il y a quelques années déjà. Quand son père a perdu son permis de conduire, elle s'est occupée des commissions, de l'épicerie, des rendez-vous médicaux. Son père est mort à la fin de l'été dernier. Âgée de 87 ans, sa mère se retrouve seule. Elle vit toujours dans son logement, mais a perdu un peu d'autonomie. Elle est diabétique, ce qui entraîne certains pépins de santé. Les activités quotidiennes, comme se cuisiner des repas, sont plus difficiles qu'avant.

« Ma présence s'est accrue depuis que mon père est décédé. J'appelle ma mère chaque jour, je l'accompagne à ses rendez-vous médicaux, je fais ses commissions. Je lui cherche une résidence. Je cherche aussi des traiteurs pour qu'elle puisse s'alimenter », explique Mme Rico.

Entre son travail à temps plein, sa fille adolescente dont elle s'occupe en garde partagée et ses allers-retours de Montréal à la Rive-Sud pour voir sa mère, Mme Rico reconnaît se trouver« à côté de ses pompes » depuis quelque temps.

« J'ai plus de difficulté à me soutenir moi-même, dit-elle. Je dois m'occuper de mon épicerie à moi aussi, du ménage. Disons que mon temps libre est considérablement réduit. J'essaie donc de trouver des alternatives. »

Le fait de vivre seul rend sa mère craintive. Elle se sent fragile et ça l'angoisse. Envisager de déménager la bouleverse tout autant. « Ce sont de petites choses de la vie quotidienne qui font que tu peux rester chez toi plus longtemps ou non », constate Mme Rico.

Faute de choix, Mme Rico cherche une résidence pour sa mère, plus près d'elle à Montréal. Elle en avait trouvé une, mais sa mère n'était pas prête. Elle est maintenant sur une liste d'attente.

Mme Rico a des frères qui l'épaulent, mais le plus lourd fardeau incombe souvent aux femmes, reconnaît-elle. « C'est normal de prendre soin de mon parent qui a pris soin de moi, dit-elle toutefois. C'est comme un retour du balancier. Je ne me verrais pas la laisser toute seule dans cette situation sans soutien. »

Photo Édouard Plante-Fréchette, La Presse

Roseline Rico et sa mère Adèle.