Des chercheurs américains ont élucidé l'une des causes d'un problème qui touche la moitié des sidéens. Contrairement à l'idée reçue, les médicaments ne sont pas les seuls responsables de la dysmorphie adipeuse associée au sida, qui déforme le corps des patients. L'une des protéines du virus est elle-même en cause et pourrait être ciblée par de nouveaux médicaments.

«Cette étude montre que les médicaments ne sont peut-être pas la principale cause de cette dysmorphie», explique Mark Wainberg, qui dirige, à l'Hôpital général juif, le Centre de recherche sur le sida de l'Université McGill. «C'est une très bonne nouvelle pour les patients. C'est un problème important de qualité de vie. On peut maintenant envisager de le combattre. C'est la première fois qu'on identifie un mécanisme dans ce trouble.»

La dysmorphie peut se présenter sous forme de décharnement du visage, ou encore d'un gonflement de l'abdomen ou des fesses. Cette altération des tissus adipeux peut entraîner des problèmes cognitifs. Dans de rares cas, les patients interrompent la thérapie dans l'espoir de retrouver leur corps d'avant - un espoir peut-être vain, puisque la nouvelle étude américaine montre que le virus lui-même cause une dysmorphie. Selon le Dr Wainberg, seulement 5% des patients interrompent leur traitement pour cette raison.

«Il y a une dizaine d'années, j'ai commencé à avoir beaucoup de patients infectés par le VIH à ma clinique d'endocrinologie», explique Ashok Balasubramanyam, du Collège de médecine Baylor à Houston, auteur principal de l'étude publiée hier dans la revue Science Translational Medicine

Protéine du virus

«Nous avons essayé de savoir ce qui se passait. Nous nous attendions à trouver une molécule liée aux médicaments, mais finalement, c'est une protéine du virus qui est apparue. Nous avons vérifié la validité du lien de trois manières, dont avec des souris génétiquement modifiées. Il nous faut maintenant confirmer que cela se passe chez l'homme de la même manière. On pourra cibler la protéine avec des anticorps ou alors avec d'autres médicaments. Ça pourrait aussi aider aux recherches sur l'origine virale de l'épidémie d'obésité qui frappe les pays développés.»

L'étude montre également que de très petites quantités de virus causent la maladie, note le Dr Wainberg. «C'est un effet puissant. Ça donne à espérer que les médicaments jouent un rôle beaucoup moins grand que prévu.»