Les cadres du gouvernement fédéral vont mal. La présence de problèmes de santé mentale - notamment la dépression - a presque doublé au cours des cinq dernières années dans la haute fonction publique fédérale, selon une étude scientifique. Et 20% de ses membres consomment des médicaments pour traiter la dépression, l'anxiété ou l'insomnie.

Le climat tendu créé par la vague de mises à pied des deux dernières années pourrait ne pas être étranger à cette dégradation, selon la spécialiste qui a dirigé le sondage.

«Les cadres ont rapporté vivre plus d'insécurité que dans les années antérieures, a indiqué Louise Lemyre, professeure à l'Université d'Ottawa. Ils sont moins satisfaits de leur horizon de carrière.»

La proportion de cadres du gouvernement fédéral qui disent avoir un problème de santé mentale diagnostiqué est passée de 6 à 11% de 2007 à 2012, selon l'étude réalisée auprès de quelque 2300 fonctionnaires pour le compte de leur association professionnelle.

«Il y a une part de cette détresse qui pourrait être amenuisée avec des stratégies de soutien», selon Mme Lemyre.

Harcèlement

Si beaucoup s'imaginent que les fonctionnaires fédéraux travaillent dans un milieu calme et feutré, un nombre étonnamment élevé de cadres assurent être victimes de harcèlement en cours d'emploi.

Plus d'un haut fonctionnaire sur cinq a affirmé avoir été harcelé verbalement au cours des 12 derniers mois, une donnée en hausse marquée depuis 10 ans.

Selon Louise Lemyre, le harcèlement dans un milieu comme la fonction publique prend des formes plus subtiles mais aussi néfastes que dans des milieux plutôt «manuels». Dans la fonction publique, le phénomène est «inquiétant», a-t-elle estimé.

«Une des formes, c'est le traitement par le silence: ignorer [une personne], ne pas lui répondre», a expliqué Mme Lemyre. Ça crée chez l'individu le sentiment de ne pas être à sa place et d'être rejeté.»

Le sondage montre aussi qu'un haut fonctionnaire sur dix estime qu'il travaille dans un «milieu irrespectueux».

«Les taux de harcèlement verbal nous préoccupent depuis un certain temps, a affirmé Lisanne Lacroix, la patronne de l'Association professionnelle des cadres supérieurs de la Fonction publique du Canada. La politesse au travail est un facteur important de protection contre le stress et la maladie mentale.»

Améliorations

Si les données concernant le harcèlement et la santé mentale peuvent inquiéter, d'autres données sont plus positives sur le plan de la santé au travail, selon Louise Lemyre.

La diminution du nombre d'heures travaillées entre notamment dans cette catégorie. Les cadres estiment travailler en moyenne 50 heures par semaine, contre 52 il y a 5 ans.

La proportion de hauts fonctionnaires travaillant plus de 55 heures par semaine - une limite au-delà de laquelle il peut y avoir un impact sur la santé du travailleur - a aussi baissé.

Quelques chiffres

- 20% des cadres supérieurs consomment des médicaments pour traiter la dépression, l'anxiété ou l'insomnie.

- 25% affichent des symptômes d'épuisement grave, soit une augmentation de 3% depuis 2007.

- Plus de 50% songent une fois par mois ou plus à quitter leur poste actuel.

- Plus de 22% déclarent être harcelés verbalement.

- Avec William Leclerc