Au cours des dernières années, un pharmacien montréalais a aggravé des pénuries de médicaments - notamment des traitements anticancéreux - en achetant de grandes quantités de comprimés en rupture de stock, avant de les revendre à ses collègues pharmaciens.

Mario Hannouche vient de plaider coupable à 13 chefs d'accusation devant le Conseil de discipline de l'Ordre des pharmaciens. Il devrait être radié pendant 18 mois et payer près de 20 000$ d'amende.

En 2011, une pénurie d'un type de progestérone (une hormone féminine) sévissait au Québec «chez tous les grossistes», selon l'Ordre des pharmaciens. Le médicament sert à soulager les chaleurs pré-ménopause en faibles doses, mais aussi, en fortes doses, à traiter le cancer du sein.

Peu après le début de la pénurie, le professionnel a fait une razzia sur les comprimés à forte concentration - destinés aux malades du cancer - chez les fournisseurs qui en avaient encore. Il a acheté 2500 de ces comprimés, avant de les broyer et d'en faire des milliers de comprimés à faible dose.

«On a créé une pénurie» pour les patients atteints de cancer, a déploré la syndic de l'Ordre des pharmaciens, lors de l'audience de lundi. D'un ton réprobateur, Lynda Chartrand a ajouté que lors d'un interrogatoire de M. Hannouche, «il m'a dit que ça avait été une idée géniale».

Le stratagème se serait reproduit avec d'autres traitements anticancéreux - notamment la mercaptopurine, utilisée pour traiter la leucémie - selon les accusations auxquelles M. Hannouche a plaidé coupable.

Pour les Américains

Le pharmacien a aussi reconnu avoir fourni de grandes quantités de médicaments en provenance de fournisseurs québécois à une pharmacie en ligne destinées aux internautes américains, mais située au Manitoba. Ces importants achats créaient des distorsions dans le marché pharmaceutique local, selon la syndic de l'Ordre, car plusieurs médicaments spécialisés sont produits en quantité limitée, selon la demande réelle.

«Moi, ce qui m'inquiète, c'est qu'on voit beaucoup de médicaments contre le cancer, a indiqué Mme Chartrand. Après ça, on a des ruptures d'inventaire, ici au Canada. Ce n'est pas étranger à ça.»

M. Hannouche avait aussi d'autres stratagèmes pour faire grimper les profits de la pharmacie où il travaillait. Il a notamment revendu à d'autres pharmaciens des médicaments qu'il a acquis à un prix très bas, car ils étaient réservés à l'exportation hors de la province.

Le pharmacien a aussi reconnu avoir volé, dans une clinique à son commerce, des centaines d'échantillons «qu'il destinait à la vente à ses patients».

Le président du conseil de discipline devrait confirmer la suggestion commune des parties quant à la sanction à imposer à Mario Hannouche: un an et demi de radiation et 19 000$ d'amende.