Les liens du CUSM avec le Koweït font partie du legs de l'ancien directeur général Arthur Porter. Surtout connu pour l'enquête anticorruption dont il fait l'objet et le déficit historique qu'il a laissé derrière lui, le Dr Porter a aussi favorisé la création d'une entreprise privée chargée de vendre à l'étranger l'expertise mondialement reconnue du centre hospitalier et de redistribuer l'argent selon son bon vouloir.

L'entreprise en question, Montreal Medical International (MMI), a été incorporée en 2004. Son seul actionnaire est un organisme à but non lucratif, la Fondation soins santé optimal. Elle est dirigée par Michael Churchill-Smith, le chef de la division internationale du CUSM.

La mission de MMI est de vendre l'expertise et les conseils des médecins du CUSM à l'étranger, à des fins de formation et de développement. Les médecins sont recrutés comme des contractuels indépendants après négociation de leurs honoraires, mais le CUSM s'assure que leurs voyages à l'étranger sont organisés de façon à ne pas avoir d'impact sur les soins hospitaliers au Québec.

Des sommes confidentielles

MMI paye le CUSM pour sa coopération et pour pouvoir utiliser son nom. Les sommes versées aux médecins et au centre hospitalier demeurent toutefois des informations commerciales confidentielles inaccessibles au public.

Tous les profits de MMI sont ensuite versés à la Fondation soins santé optimal, qui les redistribue sous forme de subventions pour des projets de recherche, des bourses d'études et d'autres contributions au réseau de santé public.

Comme il s'agit d'un organisme privé, les sommes distribuées sont elles aussi gardées secrètes. Ni le CUSM ni MMI n'ont voulu les communiquer à La Presse.

«En résumé, le système de santé public québécois bénéficiera des revenus envoyés à Optimal [...] et bénéficie présentement du paiement au CUSM de frais substantiels», a assuré le Dr Churchill-Smith dans un courriel.

En 2010, MMI a signé sa première entente avec un pays étranger: le Koweït. L'entreprise montréalaise a même ouvert un bureau, dans la grande tour Ahmed, dans la rue du Golfe arabique, dans la capitale, Koweït.

Deux autres controverses

En entrevue au journal Les Affaires, en avril 2011, Michael Churchill-Smith avait assuré qu'aucun patient du Koweit ne serait amené à Montréal pour être opéré dans les hôpitaux publics. «Nous avons voulu éviter la controverse», avait-il déclaré.

La donne a changé au cours de l'année 2011, quand un des médecins du CUSM en mission au Koweït a rencontré une patiente qui avait besoin d'une opération cardiaque. Il a fait le lien avec son hôpital à Montréal. C'est ce qui a mené à l'idée de l'envoyer en avion au CUSM.

Au cours de la dernière année, MMI a été mêlée à deux autres controverses. Un ancien bras droit d'Arthur Porter au CUSM, Yanai Elbaz, a déposé une poursuite civile à la fois contre la société et le centre hospitalier, afin de se faire payer 200 000$ qui lui avaient été promis en frais de consultant international.

Puis, en décembre, à la suite d'un reportage de The Gazette, la Régie de l'assurance maladie du Québec (RAMQ) a déclenché une enquête sur un autre programme de MMI, qui vend un «accès rapide» à une seconde opinion médicale auprès des médecins du CUSM, pour les patients qui font affaire avec une compagnie d'assurances privée. La RAMQ a déclaré cette semaine que l'enquête en est toujours à ses débuts.