Les Québécoises atteintes d'un cancer du sein dans sa forme la plus grave sont moins nombreuses que celles du reste du pays à subir une ablation du sein. Mais quelle que soit la province, les femmes qui vivent à plus d'une heure et demie de route d'un centre de radiothérapie se résignent plus souvent à la mastectomie, révèle une étude de l'Institut canadien d'information sur la santé (ICIS), menée avec le Partenariat canadien contre le cancer, dont les résultats viennent d'être dévoilés.

Pour tirer ces conclusions, l'ICIS a suivi environ 20 000 femmes pendant 12 mois répartis sur 3 ans, à partir de la date de leur opération initiale. Rarement une étude sur le recours à la mastectomie, une intervention radicale, aura aussi été détaillée au Canada. Une partie des femmes suivies avaient reçu un diagnostic de cancer du sein invasif; les autres étaient atteintes du carcinome canalaire in situ (CCIS), un cancer moins invasif parce qu'il a l'habitude de rester confiné aux canaux de lactation.

En comparant les interventions réalisées dans chaque province, on constate que c'est au Québec qu'il y a le moins de mastectomies. Loin derrière, l'Ontario et le Manitoba arrivent respectivement deuxième et troisième.

Les Québécoises atteintes d'un cancer invasif conservent leur sein trois fois sur quatre (dans 75% des cas). En Ontario et au Manitoba, plus du tiers des femmes (37% et 36%) doivent se résoudre à l'ablation du sein.

L'Institut est allé plus loin en se demandant ce qu'il advient quand une femme doit de nouveau se faire opérer pour des complications (infection, thrombose, hémorragie ou nécrose cutanée). Encore une fois, le Québec se démarque: seulement 7% des femmes acceptent l'ablation du sein. Elles sont 8% au Manitoba, 9% en Ontario, et près de la moitié des patientes à Terre-Neuve-et-Labrador, soit 42%.

«Nous ne nous sommes pas penchés sur les causes des taux plus élevés dans certaines provinces, explique Claude Lemay, expert de l'ICIS. Ces données vont certainement alimenter des pistes de réflexion chez les chirurgiens. Ce qu'il faut noter, toutefois, c'est que plusieurs études ont démontré que le taux de survie chez la femme atteinte d'un cancer du sein invasif est le même après cinq ans, qu'elle ait une chirurgie du sein ou une mastectomie. Et les femmes doivent savoir qu'elles ont le choix.»

L'accès aux traitements

Il faudrait pousser les études plus loin, mais des données intéressantes ont aussi été recueillies sur le taux de mastectomies en fonction de l'âge, du revenu et des temps de déplacement vers une unité de radiothérapie, traitement courant après une intervention conservatrice du sein. Il appert, toutes provinces confondues, que plus de 50% des femmes qui doivent faire une heure et demie de route à l'aller et au retour renoncent à conserver leur sein. Il faut comprendre que la radiothérapie exige souvent des traitements cinq jours sur sept pendant de trois à six semaines.

Les résultats de cette vaste étude ne sont pas sans rappeler ceux d'une recherche sur la césarienne, qui a démontré que le recours à cette intervention varie beaucoup d'une province à l'autre. Dans le cas du cancer du sein, par exemple, on constate que le choix de réopérer une femme pour des complications varie grandement selon le chirurgien et l'hôpital. «Il n'existe pas de normes en cette matière», indique l'ICIS, ce qui peut expliquer le vaste écart selon l'emplacement géographique.