Le Centre universitaire de santé McGill (CUSM) refuse de payer les centaines de milliers de dollars d'honoraires professionnels que son ex-directeur général, Arthur Porter, a fait miroiter à son bras droit lorsque celui-ci a quitté l'établissement pour devenir consultant.

Rien ne va plus entre la nouvelle administration du centre hospitalier et Yanai Elbaz, son ancien directeur au redéploiement, à la planification et à la gestion immobilière. L'ancien cadre, qui avait piloté le projet de construction du nouveau grand hôpital, a intenté une poursuite en cour pour forcer le CUSM et un de ses partenaires à payer ses honoraires.

L'affaire remonte à octobre 2011. Elbaz, qui venait de quitter volontairement ses fonctions au CUSM, décide de devenir consultant privé.

Pour aider son collaborateur de longue date à trouver une nouvelle source de revenus, le directeur général du CUSM, Arthur Porter, joint la société Montréal Médical International (MMI).

MMI est une société médicale privée indépendante du CUSM, mais qui entretient des liens d'affaires étroits avec l'établissement. Arthur Porter a contribué à sa création en 2005, peu après son arrivée au CUSM.

Elle vise à aider des pays étrangers à améliorer leurs hôpitaux et établissements de santé. L'un de ses dirigeants, Ken Greenaway, la présente sur l'internet comme la «représentante autorisée exclusive» du CUSM pour toutes les initiatives internationales du centre hospitalier. «Le CUSM, avec son large bassin de professionnels des soins de santé et ses systèmes de soins avancés, par l'entremise de MMI, offre de l'assistance à des pays, des gouvernements et des hôpitaux partout dans le monde», dit-il.

Plusieurs des dirigeants de MMI, dont son PDG, sont aussi des dirigeants du CUSM. Les profits de MMI sont versés à une fondation enregistrée comme organisme de bienfaisance, avant d'être réinvestis dans la recherche, la formation de professionnels, des projets d'amélioration des soins et des bourses pour les médecins et les autres professionnels du réseau.

MMI possède aussi un bureau au Koweït.

425 000$ plus commissions

«Lorsque M. Elbaz a quitté le CUSM, le précédent directeur général du CUSM avait proposé à MMI de retenir les services de M. Elbaz», a expliqué hier le porte-parole du CUSM, Richard Fahey.

Selon le contrat de M. Elbaz, que La Presse a obtenu, il devait recevoir de MMI 425 000$ en trois ans pour trouver des occasions d'affaires internationales. Il pouvait aussi recevoir des commissions sur les contrats conclus.

Arthur Porter a signé le document au nom du CUSM, qui s'engageait à garantir toutes les obligations financières de MMI envers Elbaz. Si la société n'arrivait pas à payer, l'hôpital acquitterait la facture.

Les dirigeants de MMI, quant à eux, n'ont jamais signé le document. Mais dans sa poursuite, Elbaz affirme qu'on lui a dit qu'il ne s'agissait que d'une formalité.

Il a donc commencé à envoyer ses factures de consultant, qui totalisent aujourd'hui près de 200 000$. Il n'a jamais reçu un cent. Il demande aujourd'hui à la cour de forcer MMI et le CUSM à payer la note.

MMI a renvoyé toutes les questions au CUSM hier. Le centre hospitalier, de son côté, affirme que le contrat est invalide.

«Le contrat impliquait indéniablement trois parties, et apparemment une des parties n'a pas signé, ce qui le remet en question», a déclaré le nouveau directeur général du CUSM, Normand Rinfret, mardi.

«Le "contrat" proposé n'a jamais été signé par MMI, MMI n'a jamais contracté les services [d'Elbaz], une position entièrement supportée par le CUSM», a renchéri son porte-parole, Richard Fahey, hier.

Yanai Elbaz n'a pas répondu à une demande d'entrevue envoyée par courriel. Son avocat s'est refusé à tout commentaire.

Arthur Porter, sur qui enquête l'escouade Marteau relativement à l'attribution à SNC-Lavalin du contrat de construction du CUSM, ne s'est pas manifesté publiquement depuis que la police a mené une perquisition à son ancien hôpital. Il travaille maintenant dans des centres médicaux des Bahamas et des îles Turks et Caicos. Il n'a donné suite à aucun des messages de La Presse.