Le nouveau directeur général de l'hôpital du Sacré-Coeur promet de s'attaquer à la vétusté des équipements de son établissement. Quelques semaines après son arrivée en poste, le Dr Pierre Gfeller se dit même étonné de l'état dans lequel se trouve l'hôpital construit en 1924.

«Je savais que Sacré-Coeur était vétuste, mais il l'est encore plus que je ne croyais, a-t-il expliqué lors d'une entrevue avec La Presse. Je me suis beaucoup promené dans le réseau et je n'ai jamais vu une situation de vétusté comme celle-là. Je suis surpris qu'en 2012 ça existe encore.»

Le Dr Gfeller explique que la majorité des locaux sont dans leur état original. À l'heure actuelle, seulement 10% des chambres ont des toilettes privées, et seulement le tiers ont un système d'oxygène intramural. Le quart des chambres hébergent de trois à cinq patients. Seulement 40% des lits sont à commande électrique, et ce n'est pas par manque d'argent mais plutôt parce que le système électrique de l'hôpital n'a pas la capacité d'en absorber davantage. «C'est quand même exceptionnel, il n'y a pas beaucoup de situations comme celles-là dans le parc immobilier du réseau de la santé québécois», souligne le Dr Gfeller, médecin de famille de formation et gestionnaire en santé depuis 10 ans. «Lorsque cinq patients se partagent une toilette, on s'approche du contexte auberge de jeunesse des années 70!», affirme-t-il.

Plusieurs missions

L'hôpital du Sacré-Coeur joue un rôle bien particulier dans le réseau de la santé.

Il sert la population locale des quartiers Bordeaux et Cartierville, de l'arrondissement de Saint-Laurent, ainsi que celle de l'ouest de Laval, ville qui ne compte qu'un seul hôpital.

L'établissement est aussi un chef de file en matière de traumatologie. Il accueille de 3000 à 3500 polytraumatisés chaque année. Les accidentés de la route sont généralement transportés à cet hôpital en raison de son emplacement stratégique, près de quatre axes routiers d'importance.

C'est également à Sacré-Coeur que sont dirigés les habitants de la région des Laurentides qui ont besoin de soins surspécialisés, comme la cardiologie et la pneumologie.

L'hôpital sert donc potentiellement un bassin de 800 000 personnes, soit le dixième de la population du Québec.

Environ 2200 accouchements y sont faits annuellement, mais il y aurait quelque 4000 naissances dans les secteurs que couvre l'hôpital. En ce moment, les chambres de naissance accueillent deux mères à la fois, et les pères ne peuvent y dormir.

Afin de répondre aux besoins de la région, qui connaît une forte croissance démographique, et d'améliorer l'établissement, qui cache mal le poids des années, un plan immobilier de 450 millions a été établi.

En avril, l'ancien ministre de la Santé Yves Bolduc a annoncé la construction d'un nouveau centre intégré de traumatologie, qui pourra accueillir des patients d'ici à 2015, ainsi qu'un nouveau centre mère-enfant. Une enveloppe de 40 millions a été accordée pour la première phase de ce projet, qui en compte quatre. On attend toujours que le ministère de la Santé donne le coup d'envoi de la première phase. «J'espère que les dirigeants vont comprendre qu'on a besoin d'un signal bientôt. Nous avons un bon contact avec les décideurs, ça chemine bien, mais on aimerait avoir un signal pour nos équipes qui ont travaillé fort au cours des deux dernières années... Le travail de redressement de l'institution a été fait.»

On ne sait pas encore si les autres phases seront financées. Si tout va de l'avant, il faudra environ 10 ans pour que l'hôpital atteigne les normes en vigueur dans les nouveaux hôpitaux, estime le Dr Gfeller.

Renforcer les liens

Lors de sa première entrevue médiatique, le Dr Gfeller a également affirmé vouloir un partenariat plus serré entre les médecins et l'administration de l'hôpital.

En 2010, une véritable crise a secoué l'hôpital du Sacré-Coeur lorsque les 152 membres du conseil des médecins, dentistes et pharmaciens (CMDP) de l'établissement ont voté à la quasi-unanimité pour exiger la démission du directeur général de l'époque, Michel Larivière. Plusieurs autres membres du conseil d'administration ont claqué la porte au cours de la même période.

«Je n'étais pas là en 2010, mais il est clair qu'il y a eu un bris de confiance entre l'équipe médicale et l'équipe de gestion qui était en place. On va donc travailler là-dessus», assure-t-il.

«La qualité des services que l'on donne est liée à la façon dont le personnel est traité. Je veux qu'on soit près de notre personnel. J'ai déjà demandé à nos cadres intermédiaires d'être davantage sur le terrain.»