Plus d'un an après que le ministre Bolduc eut annoncé sa création en grande pompe, la Direction québécoise du cancer n'est toujours qu'une «coquille vide», selon la Coalition priorité cancer du Québec. «Hormis le changement du nom de la direction et quelques remplacements de personnel, rien d'autre n'a été réalisé», déplore le Dr Pierre Audet-Lapointe, président de la Coalition. Il a d'ailleurs demandé au premier ministre d'intervenir dans une lettre que La Presse a obtenue.

Cette nouvelle direction, qui relève du ministère de la Santé et des Services sociaux, s'appelait autrefois «Direction de la lutte contre le cancer». Elle doit devenir l'instance suprême pour guider les activités de lutte contre le cancer au Québec. Or, dans l'étude des crédits budgétaires 2012-2013 effectuée à la mi-avril, aucune somme supplémentaire n'a été dégagée pour lui donner du vent dans les voiles, a-t-on constaté.

Pendant ce temps, le registre sur le cancer se fait attendre, tout comme la mise en place d'un programme uniforme de dépistage du cancer colorectal. De plus, on attend toujours des directives claires en matière de recherche et de révision du processus d'approbation des médicaments anticancéreux.

«Nous ne sommes pas capables de savoir si cette direction a des dents ou de la poigne dans les actions contre le cancer, affirme la vice-présidente de la Coalition, Nathalie Rodrigue. Nous espérons que cette direction agisse comme une agence de la santé, avec de réels pouvoirs de coordination et un budget. Mais tout ce qu'on sait pour l'instant, c'est qu'un nouveau directeur a été nommé.»

Au mois de janvier dernier, le ministre Yves Bolduc a en effet annoncé la nomination du Dr Jean Latreille pour prendre la relève du Dr Antoine Loutfi, qui était à la Direction de la lutte contre le cancer depuis sept ans. Le Dr Latreille, spécialiste en oncologie médicale et en hématologie, a notamment participé à la mise en place du Programme québécois de lutte contre le cancer.

Jusqu'à tout récemment, il pratiquait encore, a-t-on expliqué au ministère de la Santé. Comme il planche sur les derniers détails de son plan d'action pour la nouvelle direction du cancer, a-t-on ajouté, il n'a pas été en mesure de nous accorder une entrevue. Le ministère précise que des millions supplémentaires (le montant exact n'a pas été précisé) ont été dégagés dans le dernier budget pour la mise sur les rails de la nouvelle direction du cancer.

Mourir à la maison

Devant ce silence, la Coalition priorité cancer au Québec espère à tout le moins que ce plan accordera une place importante aux soins palliatifs à domicile. Des études provinciales ont déjà démontré que 80% des gens atteints d'un cancer en phase terminale veulent mourir à la maison, mais qu'à peine 9% y parviennent en raison du manque de ressources et de l'absence de soutien aux aidants naturels.

Au Québec, une région se démarque toutefois des autres et pourrait servir de modèle au gouvernement. Dans le territoire desservi par le CLSC Arthabaska-et-de-l'Érable, plus de la moitié des personnes nécessitant des soins palliatifs parviennent à finir leurs jours à la maison si elles le souhaitent. L'an dernier, par exemple, 93 des 193 personnes mortes ont pu finir leurs jours à la maison; 12 ont choisi l'hôpital, mais seulement dans les derniers moments de leur vie.

Maryse Pellerin, coordonnatrice du soutien à domicile pour ce CLSC, explique que «l'humanisme» est à la base de ses soins. «On a une approche personnalisée, pas juste pour les soins de fin de vie, mais pour tout le processus de soins palliatifs. On a mis sur pied ce qu'on appelle une triade de base: infirmières, travailleur social et médecins. Ici, tout le personnel est habileté à ce type de soins, avec du soutien aux proches aidants. Nous y parvenons, même si nous n'avons que deux médecins pour veiller sur les soins à domicile.»