À la suite d'une erreur d'emballage, la société pharmaceutique Sandoz a décidé de rappeler jeudi soir un lot de 57 000 fioles de morphine, soit plus de la moitié de la consommation mensuelle du médicament au Canada.

Santé Canada a diffusé un avis urgent, dans la nuit de mercredi à jeudi, indiquant que des ampoules de chlorhydrate d'isoprotérénol, médicament utilisé en chirurgie cardiaque, pourraient se retrouver dans des boîtes identifiées comme contenant de la morphine.

Pour l'instant, on ne signale pas de patient qui aurait reçu le mauvais médicament, a indiqué Steve Outhouse, le porte-parole de la ministre fédérale de la Santé, Leona Aglukkaq. Il n'empêche que ce nouvel incident risque d'aggraver la pénurie de médicaments injectables qui frappe l'ensemble du pays depuis la mi-février.

Sandoz Canada aurait été informé de l'erreur d'emballage lorsqu'un hôpital de la région de Toronto a découvert que des ampoules de 1 ml étiquetées comme étant du chlorhydrate d'isoprotérénol injectable de concentration de 0,2 mg/ml avaient été placées par erreur dans une boîte dont la mention d'étiquetage indiquait qu'elle contenait du sulfate de morphine injectable à une concentration de 2 mg/ml. La boîte renfermait des ampoules étiquetées comme étant de la morphine ainsi que d'autres étiquetées comme étant du chlorhydrate d'isoprotérénol. Des analyses ont démontré que les ampoules contenaient les produits bel et bien identifiés sur les étiquettes.

Tôt jeudi matin, le gouvernement fédéral avait déjà demandé aux établissements de santé et aux pharmacies d'isoler «sans tarder» tout produit provenant du lot à risque. Une partie du lot, soit 57 000 fioles, aurait été acheminé début mars dans des hôpitaux partout au Canada. Vraisemblablement, des produits du lot ont été administrés à des patients, ce qui porte à croire que moins de fioles seront retournées à Sandoz. Santé Canada affirme que 100 000 ampoules de morphine sont administrées chaque mois au pays. Le reste du lot, soit 103 000 fioles, se trouve toujours dans l'entrepôt de Sandoz, à Boucherville.

«Sandoz Canada inspecte présentement son inventaire de boîtes de morphine du lot touché afin de confirmer que les boîtes de morphine contiennent le bon produit. Lorsque Sandoz Canada aura déterminé que toutes les boîtes contiennent le bon produit, on apposera un sceau sur l'inventaire pour indiquer qu'il a été inspecté et que les produits peuvent être admis sur le marché. Les produits présentement distribués et qui font l'objet d'un rappel ne seront pas réadmis», a écrit Santé Canada dans un avis diffusé jeudi soir.

Dangers pour la santé

Le chlorhydrate d'isoprotérénol est un médicament qui sert à dilater les bronches ou à accélérer le rythme cardiaque lors d'actes médicaux.

«L'usage accidentel d'une solution injectable de chlorhydrate d'isoprotérénol au lieu d'une solution injectable de sulfate de morphine peut entraîner des effets graves sur la santé. Les patients ne recevront pas la thérapie morphinique prévue. De plus, le chlorhydrate d'isoprotérénol est un agent adrénergique puissant. Il est associé à un risque de tachycardie et d'arythmie, lesquelles peuvent mettre la vie du patient en danger. Il peut y avoir d'autres effets secondaires, comme des maux de tête, des tremblements et de la transpiration», a écrit Santé Canada dans un avis qu'elle a acheminé aux professionnels de la santé dans la nuit de mercredi à jeudi.

Santé Canada affirme par ailleurs que Sandoz Canada ne peut, pour le moment, confirmer s'il existe d'autres emballages qui ont fait l'objet d'une erreur.

Octane Stratégies, la firme de relations publiques qui représente la société pharmaceutique a affirmé ce matin que Sandoz préparait une déclaration, mais nos questions sont restées sans réponses.

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Pénurie de médicaments 



Le système hospitalier canadien gère depuis plus d'un mois la plus importante pénurie de médicaments injectables de son histoire. Un ralentissement de production à l'usine Sandoz

de Boucherville est à l'origine

de cette crise.

Sandoz Canada est le principal fournisseur de plusieurs médicaments injectables pour les hôpitaux québécois. Ces produits sont essentiels pour les soins critiques et intensifs ainsi qu'en chirurgie.

Le 16 février dernier, la société pharmaceutique a annoncé qu'elle apporterait des correctifs à son usine de Boucherville à la suite d'un avertissement lancé de la Food and Drug Administration (FDA) américaine, qui a relevé

des «violations importantes» dans ses normes de production. Au début du mois de mars, l'usine a suspendu sa production pour environ une semaine afin de nettoyer les dégâts causés par un incendie.