Le débat sur l'accessibilité des soins de santé a repris de plus belle à l'Assemblée nationale, au lendemain des révélations de La Presse à propos de DocTel.

Ce service de consultation téléphonique permet de parler à un médecin pour 38$. Au téléphone, le médecin peut poser un diagnostic pour des problèmes de santé mineurs, comme une infection urinaire, une entorse ou des maux de tête. Au besoin, il peut même téléphoner à la pharmacie du patient pour lui prescrire un médicament, comme des antibiotiques ou des anti-inflammatoires.

Selon la députée péquiste Agrès Maltais, DocTel est la preuve que «l'accès aux soins de première ligne est devenu tellement difficile que la population est prête à essayer toutes les alternatives».

Le Parti québécois a déjà proposé de permettre aux pharmaciens de prescrire eux-mêmes des médicaments ainsi que de prolonger et de renouveler des ordonnances. «Pourquoi le ministre n'a-t-il rien fait depuis un an?» a demandé Mme Maltais, hier, à l'Assemblée nationale.

Le ministre de la Santé, Yves Bolduc, s'est dit prêt à accorder le droit de «represcription» aux pharmaciens. Si la situation stagne depuis près de neuf mois, s'est-il défendu, c'est que l'Ordre des pharmaciens veut revoir le dossier au complet, pour obtenir aussi le droit de traiter des infections mineures, comme c'est le cas dans d'autres provinces.

«Une loi, on la modifie tous les 10 ou 15 ans. Dans les autres provinces, on n'a jamais modifié la loi seulement pour le renouvellement des ordonnances. On a toujours intégré d'autres actes comme ceux qu'on demande», a expliqué à La Presse la présidente de l'Ordre des pharmaciens, Diane Lamarre.

Par exemple, les pharmaciens voudraient pouvoir traiter des allergies, des infections urinaires, des feux sauvages, ou encore fournir un traitement préventif pour la diarrhée des voyageurs.

«Les 2 millions de Québécois qui n'ont pas de médecin auraient accès à un traitement plus efficace, plus rapidement, et ça leur éviterait d'avoir recours aux urgences», a dit Mme Lamarre.

Mais le Collège des médecins a des réticences, si bien que les discussions se poursuivent.

Médecine au téléphone

Par ailleurs, le ministre de la Santé a assuré que des vérifications seraient faites à propos de DocTel. «C'est une alternative qui est questionnable», a dit Yves Bolduc.

«Nous avons discuté avec le Collège des médecins pour nous assurer qu'il y a vraiment eu une vérification. Il va y avoir également une vérification du côté de la Régie de l'assurance maladie du Québec pour voir la légalité», a-t-il précisé.

Mais le Dr Michael Mansour, qui a lancé DocTel en septembre 2009, considère qu'il respecte la Loi sur l'assurance maladie. «Ils ne peuvent rien me reprocher», a-t-il affirmé.

En effet, la consultation téléphonique n'est pas un acte couvert par l'assurance maladie. Les médecins affiliés à la RAMQ peuvent donc la facturer, a expliqué le porte-parole de la RAMQ, Marc Lortie. «Mais nous allons vérifier l'ensemble du modèle d'affaires», a-t-il dit.

De son côté, le Collège des médecins éprouve un malaise au sujet des consultations téléphoniques.

Mais le Dr Mansour, qui répond à deux ou trois appels par semaine avec DocTel, assure que sa pratique est rigoureuse. Notamment, il conserve les dossiers de la soixantaine de patients membres de DocTel. Et il prévient toujours les patients qu'ils devront peut-être se présenter aux urgences. «Il y a des limites: on ne peut pas faire des miracles au téléphone», dit-il.