Christian Paire, directeur général du Centre hospitalier de l'Université de Montréal, veut mettre fin une bonne fois pour toutes au calvaire des patients qui doivent souvent attendre plus de 20 heures sur les civières des urgences, quand ce n'est pas 48 heures. Il en fait sa priorité.

Les urgences des pavillons Notre-Dame, Saint-Luc et de l'Hôtel-Dieu n'ont jamais été aussi sollicitées, révèlent en effet les dernières données que La Presse a obtenues. Et le ministre Yves Bolduc presse le CHUM d'éliminer les séjours de 24 heures et plus.

À la dernière réunion du conseil d'administration, la direction des affaires cliniques du CHUM, après avoir tracé un portrait peu reluisant de ses urgences, a présenté une dizaine de mesures de correction. Si le taux d'occupation à l'hôpital Notre-Dame est sensiblement le même que l'an dernier, pour un temps d'attente moyen de 27 h 18, le nombre de patients aux urgences de Saint-Luc et de l'Hôtel-Dieu a encore bondi cet hiver. Il s'élève à quelque 3000 patients par mois, qui attendent en moyenne près de 20 heures.

L'une des mesures envisagées pour corriger la situation vise donc les personnes qui se présentent aux urgences plusieurs fois par année. La Dre Michèle de Guise, conseillère à la direction des services professionnels pour l'optimisation des soins, a expliqué à La Presse que certaines personnes peuvent se présenter à l'hôpital jusqu'à 50, voire 80 fois par année. «On est tenté de croire qu'il s'agit de personnes âgées, mais ce n'est pas entièrement vrai, dit-elle. On a une problématique particulière de santé mentale : des gens avec des problèmes d'alcool, de toxicomanie, des gens sans domicile fixe aussi. Nous travaillons donc avec le CSSS Jeanne-Mance pour des services en amont des urgences, en nous inspirant d'une expérience qui porte ses fruits sur la Rive-Nord.»

Nouvelle unité d'hospitalisation

D'ici au mois d'avril, le CHUM annoncera par ailleurs l'ouverture d'une nouvelle unité de soins à l'hôpital Notre-Dame. Dotée d'une douzaine de lits, elle sera réservée aux patients qui ont besoin d'une surveillance médicale de quelques jours: hémorragie digestive, problèmes ostéoarticulaires qui nécessitent des infiltrations, maladies pulmonaires chroniques, etc. Une autre mesure vise à diriger vers les cliniques-réseau les patients de la catégorie 5, c'est-à-dire les cas jugés non urgents (symptômes d'allure grippale, vomissements ou traumatismes mineurs).

La directrice adjointe des affaires cliniques, Esther Leclerc, qui pilote le dossier, dit qu'il serait téméraire de penser que les séjours de

24 ou 48 heures aux urgences seront éliminés l'an prochain. «Mais j'ai bon espoir de pouvoir annoncer dans un an que les séjours ont diminué de trois, quatre ou même cinq heures. On a déjà des affiches dans nos urgences qui donnent les coordonnées des cliniques-réseau. Plusieurs sont équipées pour faire des radiographies.»

Le ministre de la Santé, Yves Bolduc, a déjà rencontré trois fois la direction du CHUM : en juillet, en septembre et en novembre. En 2009, le ministre s'était donné trois ans pour ramener à 12 heures le temps d'attente moyen dans les urgences de tout le Québec. Mais avec une moyenne de plus de 20 heures dans la grande région de Montréal, on est encore loin de cet objectif.

Au cabinet du ministre, l'attachée de presse Karine Rivard a expliqué que son patron reçoit chaque jour vers 11 h un rapport sur le temps d'attente dans les urgences. «Il a rencontré toutes les directions des urgences, dit-elle. C'est clair qu'on veut de l'efficience et à court terme. En réduisant les temps d'attente, on va réaliser des économies.»

À l'hôpital Saint-Luc, hier, toutes les civières étaient occupées. À Notre-Dame, il y avait près de deux fois plus de patients que de lits fonctionnels, tout comme à l'Hôtel-Dieu.