Huit Canadiens sur dix craignent que la qualité des soins en prenne pour son rhume avec le vieillissement des baby-boomers. Cette inquiétude est encore plus forte chez les personnes de 46 ans et moins, qui s'attendent à devoir faire les frais de notre système de santé en étant même obligés de repousser l'âge de leur retraite, faute de revenus suffisants.

C'est ce que révèle la dixième étude sur la santé au pays de l'Association médicale canadienne (AMC), dont les résultats sont dévoilés aujourd'hui.

Et les Canadiens ne se font pas d'illusions. Plus de trois sur quatre (76%) appréhendent de devoir payer plus d'impôts afin que le système de santé puisse offrir les services et les soins aux boomers. Ils s'attendent aussi à devoir se priver de voyages et à devoir piger dans leurs économies. Bref, à payer pour cette génération qui atteindra 65 ans cette année.

«On savait qu'il y avait une crainte au sujet du vieillissement de la population, explique le Dr Robert Ouellet, président sortant de l'Association médicale canadienne. Mais il est intéressant de constater à quel point les jeunes sont conscients. Ils s'attendent à ce qu'on appelle un tsunami gris, et je pense qu'il ne faut pas attendre la vague pour agir. Il faut interpeller la population parce que les politiciens ne feront pas grand-chose d'eux-mêmes.»

Ticket modérateur

Tant qu'à payer, il semble qu'ils soient une majorité à préférer l'imposition d'un «ticket modérateur» à une augmentation des taxes et d'impôts.

C'est encore plus vrai au Québec, où les adultes sondés ont répondu par une proportion de 74% en faveur d'un ticket modérateur, comparativement à 60% dans le reste du pays, selon le sondage mené par Ipsos-Reid pour le compte de l'AMC, auprès de 3483 adultes canadiens entre le 8 et le 21 juin dernier. Et les plus jeunes estiment que les gouvernements devraient moduler les impôts sur la santé selon les revenus.

D'autre part, si les inquiétudes face au réseau de la santé sont les mêmes d'un océan à l'autre, les Québécois se démarquent également du reste du pays quand on leur parle d'enjeux publics. Alors que 30% des Ontariens disent que la santé devrait être en tête de la liste, cette proportion grimpe à 45% au Québec, soit près d'une personne sur deux. L'économie et l'environnement suivent dans les enjeux prioritaires. L'armée est en queue de peloton pour tous les Canadiens, avec seulement 2% de gens qui disent qu'elle devrait primer.

De manière générale, les résultats du sondage de l'Association médicale démontrent aussi que les Canadiens qui ont un médecin de famille sont plus satisfaits de notre système de santé (39%) que ceux qui n'ont pas de médecin (18%). Encore une fois, c'est particulièrement vrai au Québec.

L'Association médicale canadienne, qui était en congrès ce week-end, a l'intention de s'appuyer sur ce sondage pour presser les provinces à négocier avec le fédéral avant l'échéance de l'entente sur les transferts en santé, en 2014.

«Nous arrivons 30e sur 30 pays européens pour la qualité de notre réseau de la santé, précise le Dr Ouellet. Pourtant, le Canada est cinquième au monde en ce qui concerne l'argent investi dans la santé. Il faut donc revoir tout notre système: ce n'est pas normal, ce qui se passe dans nos urgences et ce n'est pas normal de trouver normal un délai d'attente de six mois pour une prothèse à la hanche.»