Malgré la mobilisation générale, la grippe A (H1N1) s'est révélée somme toute bénigne. Elle a causé à peine plus de morts qu'une grippe saisonnière. Comment s'assurer que la prochaine pandémie n'occasionnera pas autant d'efforts inutiles?

Tout simplement en ajoutant aux protocoles de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) une évaluation du danger de chaque grippe pandémique. C'est du moins la proposition de Danielle Laudy, bioéthicienne à l'Université de Montréal, qui participe ce matin à un colloque sur les leçons à tirer de la grippe porcine au 78e congrès de l'Association canadienne-française pour l'avancement de la science (ACFAS).

«Une fois la machine lancée, il n'y avait aucun mécanisme pour réévaluer la dangerosité de la grippe pandémique, explique Mme Laudy. C'était probablement difficile à faire. Mais il y aurait certainement pu y avoir davantage d'ajustements aux recommandations de l'OMS. Ce n'est pas tout de savoir qu'une grippe est pandémique, il faut aussi pouvoir évaluer quel danger elle pose.»

Chose certaine, calculer le nombre de victimes de la grippe est ardu. L'Agence de santé publique du Canada a évalué que 108 Québécois avaient succombé à la grippe A (H1N1). Mais selon un article publié début mai dans le New England Journal of Medicine, la grippe A (H1N1) a fait beaucoup plus de victimes que ne le disent les chiffres officiels. L'article avance le chiffre de 12 000 victimes aux États-Unis. Ce calcul, ajusté au Québec, donnerait 300 victimes.

Les chiffres de la grippe saisonnière sont tout aussi variables: selon les sources, qui font toutes des projections statistiques, le nombre de victimes au Canada va de 500 à 6000. Les autorités médicales québécoises, qui répètent régulièrement que la grippe saisonnière tue 1500 personnes chaque année dans la province, citaient quant à elles un chiffre de 59 à 132 décès «en excès» dans une présentation interne, en 2006.

«Qui sait combien de victimes il y aurait eu au Québec sans campagne de vaccination? demande Mme Laudy. En quelque sorte, on a suivi le principe de précaution.»