L'hôpital Maisonneuve-Rosemont amorce un virage complet afin d'éviter une autre crise aux urgences, comme en février dernier, lorsqu'une patiente est morte après avoir passé quatre jours dans un couloir.

Aux prises avec des installations en décrépitude et une pénurie aiguë d'infirmières, l'établissement se prépare à tripler sa superficie et à lancer une opération charme afin de recruter du personnel en soins.

Cette réorganisation, comprenant des mesures pour éliminer les heures supplémentaires obligatoires et le recours à du personnel d'agence privée, est accomplie sous la loupe du gouvernement. Une somme de 64 millions a notamment été promise par le ministre Bolduc pour rénover et agrandir les urgences, en plus de l'ouverture d'une quarantaine de lits pour désengorger les soins de courte durée.

Avec une moyenne de 180 patients par jour à soigner pour 54 civières, en incluant celles alignées dans les couloirs, la chef de l'unité de soins des urgences, Luce Gagnon, explique qu'elle doit fonctionner avec 50% de son personnel infirmier à découvert. À cela s'ajoute la pénurie d'urgentologues, avec en moyenne quatre médecins pour couvrir le quart de travail de jour, un seul en soirée, et trois médecins pour couvrir la nuit.

«Sur un total de 130 postes d'infirmières aux urgences, j'ai présentement 65 postes vacants ou sans remplacement en raison d'un congé de maternité ou autre, affirme Mme Gagnon. De ce nombre, 36 postes vacants sont à temps complet. Je n'ai donc pas le choix de recourir aux heures supplémentaires ou aux agences.»

Si ces postes ne trouvent pas preneur, ce n'est toutefois pas seulement à cause de la pénurie de personnel. Lors de la visite de La Presse aux urgences, du personnel a expliqué qu'il est plus lucratif pour une infirmière d'obtenir un poste à temps partiel et de compléter sa semaine avec des heures supplémentaires, à taux et demi.

À ce sujet, on observe que les heures supplémentaires «volontaires» effectuées entre avril 2009 et le 2 janvier dernier, représentaient 16% de toutes les heures travaillées aux urgences de Maisonneuve-Rosemont. La portion «obligatoire» a pour sa part atteint 2,5% durant cette même période.

«Salon de l'emploi»

Afin de remédier à la situation, l'hôpital ouvrira ses portes, samedi, aux étudiants en soins infirmiers. Il s'agira d'une sorte de salon de l'emploi en milieu hospitalier. Mais au-delà de l'événement, la direction des urgences a distribué un questionnaire de satisfaction à son personnel. Et elle est aussi en train de réviser les horaires, en explorant quatre modèles, dont l'un permettant aux infirmières de travailler un week-end sur trois au lieu de deux.

«Notre objectif ultime est de ne plus avoir à recourir aux agences privées, assure Mme Gagnon. Les agences ne sont de toute façon pas la solution idéale. Il arrive souvent que leurs infirmières décommandent à la dernière minute, et on fait alors face à un gros problème sur le plancher.»

À la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), on était occupé hier après-midi à manifester contre la lenteur dans les négociations avec Québec. La présidente du syndicat local de Maisonneuve-Rosemont, Valérie Vaillancourt, estime que pour inciter les infirmières à accepter des postes à temps plein ou de nuit, il faut des avantages.

«Les infirmières craignent de devoir obligatoirement effectuer des heures supplémentaires en plus des heures comprises à l'intérieur du poste à temps complet. Il faudrait par ailleurs des avantages, entre autres monétaires, pour les inciter à accepter des postes de nuit.»