Grâce à la future «franchise santé», plus les gens seront malades et plus l'Etat pourra renflouer ses coffres pour financer le réseau de la santé.

Mais Québec n'a pas encore fixé le montant total qu'il compte recueillir grâce à cette forme de ticket modérateur, a assuré le ministre de la Santé, Yves Bolduc, en entrevue à La Presse Canadienne, jeudi.

Le ministre a tenu à prendre ses distances des prétentions de l'opposition péquiste, qui estime, à partir des documents remis lors du budget déposé mardi, que le gouvernement veut aller chercher un demi-milliard $ par année dans les poches des usagers du réseau, grâce à cette initiative.

Il a convenu, cependant, que pour assurer la nécessaire augmentation annuelle de 5% du budget du réseau de la santé, il fallait trouver 500 millions $ à compter de 2013.

Une partie de cette somme pourra provenir des revenus de la franchise, mais pas nécessairement, a dit le ministre Bolduc.

Selon lui, la somme pourrait être compensée simplement par la croissance économique et les revenus supplémentaires engrangés grâce à la hausse de la TVQ. Il mise aussi sur une hausse de la productivité pour y arriver.

Il s'est aussi défendu de vouloir économiser de l'argent sur le dos des malades, en imposant cette franchise.

«Pour nous autres, ce n'est pas une question d'économiser» ou de réduire l'achalandage dans les cabinets de médecin, a dit le ministre Bolduc, mais bien de défendre «le principe de l'utilisateur-payeur».

L'ampleur de la somme à trouver, placée dans la catégorie «autres contributions à identifier» dans les documents du ministère des Finances, a fait craindre le pire à l'opposition péquiste.

Le porte-parole en santé du PQ, le député Bernard Drainville, a demandé au ministre Bolduc, jeudi, en Chambre, pourquoi il agissait de la sorte.

«Pourquoi il tient tant à taxer la maladie au Québec? Pourquoi est-ce qu'il tient tant à taxer les malades du Québec?», a demandé M. Drainville au ministre.

Il a aussi déploré le fait qu'on ne sache pas combien va bientôt coûter chaque visite à un médecin.

En fait, dans son dernier budget, Québec s'est engagé à financer le réseau, à l'aide de deux nouvelles initiatives: une contribution santé et une franchise santé, soulevant aussitôt la controverse.

La contribution santé sera un montant fixe imposé aux contribuables (qui atteindra 200 $ par année par adulte à compter de 2012), tandis que le montant de la franchise variera selon le nombre de visites médicales effectuées annuellement par l'usager.

A elle seule, la contribution santé rapportera annuellement à l'Etat 945 millions $, à compter de 2013.

Mais Québec aura besoin, au total, de 1,4 milliard $ seulement pour maintenir le niveau de service offert, d'où le trou de 500 millions $.

Un document du ministère des Finances sur le financement de la santé, remis lors du budget, indique que la somme totale requise pour financer le ministère de la Santé en 2013 atteindra 38 milliards $.

Actuellement, le budget du ministère est déjà de 31 milliards $, soit 45 pour cent du budget total de dépenses du gouvernement.

Le document du ministère des Finances faisait aussi référence au rapport du groupe de travail Castonguay, qui fixait à 25 $, le montant à assumer par l'usager à chaque visite médicale.

Le rapport Castonguay fixait aussi un plafond annuel de contribution à 1 pour cent du revenu de l'usager.

Mais tant pour le plafond que pour le montant de la franchise, le ministre Bolduc refuse d'ouvrir son jeu.

«Je ne peux pas le dire encore car on n'a pas fait la discussion», a-t-il dit.

«Je ne veux pas donner de chiffres», a-t-il ajouté, refusant de se prononcer avant que le débat ait lieu dans la population.

«Moi, présentement, je me garde toutes les ouvertures», a-t-il dit.

Il ne veut pas dire non plus à compter de quand les usagers vont devoir payer pour se faire soigner.

En ce domaine, pour ce qui est des modalités, le Québec doit inventer son propre modèle, a-t-il dit, sans se référer à ce qui se fait ailleurs dans le monde.