Sous des emballages trompeurs et grâce à l'internet, des dizaines de substances à la limite de la légalité trouvent de plus en plus preneur, s'inquiète l'Institut national de santé publique dans un nouveau bulletin.

Les consommateurs peuvent être poussés vers ces produits pour rester dans la légalité, mais ce n'est peut-être pas la meilleure décision pour leur santé.

«Le consommateur n'a aucune garantie de sécurité pour l'utilisation de ces produits», avertit la Santé publique, dans un article du pharmacien et toxicologue Pierre-André Dubé.

Les produits ont pour nom Indian tea; Ma Huang ou Mormon tea, mais contiennent de l'éphédrine. D'autres s'appelent black pepper extract (extrait de poivre noir) ou Capsicum, mais sont hallucinogènes.

D'autres encore cachent moins leur jeu: marijuana substitute, comme son nom l'indique, est un substitut à la marijuana. Aussi vendu comme potpourri, il est consommé fumé comme la mari. On le retrouve aussi sous les noms meltdown, smoke ou space, mais encore meteorites; PEP spice; scope vanilla, spice-like ou même yucatan fire.

Il ne faut pas se fier aux étiquettes, avertit M. Dubé. «Souvent, l'étiquetage sur l'emballage du produit ne précise pas l'ingrédient actif ou la concentration de la formulation, affirme-t-il. Lorsque les ingrédients actifs sont indiqués, leur concentration peut être trompeuse, inexacte ou vide de sens.» 

«Ces produits peuvent contenir une grande variété de drogues différentes, des herbes, des vitamines, des minéraux et des acides aminés. En outre, ils peuvent être adultérés par l'ajout de drogues illicites ou contaminés par des métaux lourds.»

«Dans certains cas, l'ingrédient actif est expérimental et n'a pas été suffisamment testé par des essais cliniques ou déclaré sécuritaire par une autorité indépendante et compétente comme Santé Canada. Le consommateur n'a donc aucune garantie de sécurité pour l'utilisation de ces produits.»

Jean-Sébastien Fallu, docteur en psychologie spécialisé en toxicomanie et professeur à l'Université de Montréal, a pris connaissance de l'article. Il croit lui aussi que l'accessibilité à toutes sortes de produits sur l'internet est préoccupante.

«On peut citer par exemple le BZP, dit-il. C'est une drogue légalement vendue qui est présentée comme une alternative aux drogues de synthèse. Mais il semble que ce soit pas bien contrôlé du point de vue de la qualité.»

«Le fait de continuellement criminaliser des substances pousse les consommateurs vers des produits légaux, mais pas nécessairement plus sûrs, dit M. Fallu. En Angleterre, il y a eu des décès possiblement dus à la prise de méthédrone, qui est vendu comme engrais pour plantes. Les gens prennent ça comme une alternative à l'ecstasy.»

Selon M. Dubé, la mitragynine, substance extraite d'une plante, la Mitragyna speciosa, serait actuellement achetée par 40 millions d'Américains par l'entremise d'Internet. Dans de nombreux cas, ce serait pour tenter de contrer les effets du sevrage associé aux opioïdes.

«La mitragynine a des effets stimulants du système nerveux central similaires à la cocaïne, et certaines propriétés hallucinogènes et psychotropes, affirme M. Dubé. La toxicité résultant d'un surdosage à la Mitragyna speciosa peut ressembler à celle retrouvée lors de l'intoxication aux opioïdes.»

Il souligne que, jusqu'à présent, le gouvernement canadien n'a pris aucune mesure législative pour restreindre la consommation de cette herbe ou de ses produits dérivés. Elle est cependant illégale dans plusieurs pays.