Rien ne va plus dans les négociations entre les infirmières et le gouvernement du Québec. Cinq jours avant l'échéance des conventions collectives des employés de l'État, la Fédération interprofessionnelle de la santé (FIQ) a annoncé, samedi, qu'elle quittait la table de négociations. Le fossé entre les deux parties serait si grand que déjà, le syndicat prépare sa politique sur les services essentiels qui seront maintenus en cas de moyens de pression.

«Nous n'avons pas encore parlé de débrayage avec nos membres, mais pour ne pas se faire prendre, il faut fourbir nos armes», a déclaré ce matin à La Presse, la présidente de la FIQ, Régine Laurent. «Nous avons été leurrés durant des semaines. Nous sommes allés à la table de négociations avec toute notre bonne volonté, mais le gouvernement ne spécifiait jamais comment il allait appliquer les principes qu'il proposait. Hier soir, le chat est sorti du sac!»

Le gouvernement du Québec a déposé hier une offre en vue de régler le prochain contrat de travail des infirmières. Grandement insatisfaite, la FIQ, qui représente 58 000 travailleurs en soins infirmiers et cardiorespiratoires, a claqué la porte en quittant la table sectorielle de négociation.

Environ 600 délégués de la FIQ se réuniront lundi et mardi en conseil extraordinaire à Montréal pour faire le point sur la suite des négociations. Le syndicat est déjà doté d'un mandat pour demander une médiation au moment «jugé opportun».

«Ce moment sera vite arrivé», a précisé Régine Laurent en ajoutant que, malgré l'arrivée d'un tiers à la table de négociations, le gouvernement ne serait pas «à l'abri de moyens d'actions».

Non au privé

Selon la FIQ, les négociations achoppent sur plusieurs points, particulièrement sur celui du recours aux agences privées d'infirmières. «Ils nous ont dit: la prohibition des agences privées, oubliez cela, on n'en parlera jamais.»

Les deux parties ne parviennent également pas à s'entendre sur des questions liées à l'organisation du travail. Rappelons qu'au cours des dernières semaines, des petits groupes d'infirmières de quatre établissements du Québec ont refusé d'entrer au boulot pour protester contre les heures supplémentaires obligatoires. En raison de la pénurie de main d'oeuvre, des infirmières doivent parfois effectuer des quarts de travail de 16 heures.

«On nous propose de calculer nos heures sur une base annuelle, trimestrielle ou hebdomadaire. En pratique, cela signifie que nous pourrions avoir à effectuer des journées de 16 heures sans être rémunérées en temps supplémentaire si l'on n'a pas atteint nos 40 heures semaine. On nous a également dit que certaines travailleuses ne pourraient pas prendre de vacances, mais qu'on les paierait. C'est inacceptable, les infirmières ont besoin de repos, elles sont épuisées.»

De son côté, le gouvernement du Québec refuse de parler du contenu de l'offre déposée samedi. «On ne veut pas négocier les enjeux sur la place publique», a déclaré l'attachée de presse du ministre de la Santé, Yves Bolduc, Karine Rivard, en spécifiant que les demandes de la FIQ se chiffraient à 2 milliards de dollars.

Selon ses dires, des pourparlers seraient présentement en cours entre le Front commun SISP-CSN-FTQ, qui représente 475 000 employés du secteur public, et des représentants de l'État.

«Ce qui est essentiel, c'est que les discussions se poursuivent», a-t-elle indiqué. «On invite la FIQ à revenir à la table de négociations. Le gouvernement et la FIQ veulent parvenir au même résultat. C'est sur les moyens d'y arriver qu'ils ne s'entendent pas.»

Malgré que les discussions soient rompues, le ministère de la Santé espère toujours en venir à une entente d'ici le 31 mars, date d'expiration des conventions collectives. Une échéance impossible à atteindre, croit Régine Laurent. Lundi, le gouvernement et le Front commun SISP-CSN-FTQ ont entrepris un «blitz de négociations» à l'invitation de la présidente du Conseil du Trésor, Monique Gagnon-Tremblay.