Le nombre d'infirmières au Québec a atteint un sommet historique l'an dernier: 70 587 personnes étaient inscrites au tableau de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec, dont un peu plus de 6000 hommes. Malgré ce nombre en constante progression depuis 2000, les besoins n'ont jamais été aussi criants dans les établissements de santé.

Gyslaine Desrosiers, présidente de l'Ordre des infirmières, estime que «les agences privées sont un symptôme du réseau public». Actuellement, 7500 infirmières ont choisi de poursuivre leur carrière dans le secteur privé. Selon les données de l'Ordre, 2400 travaillent pour le compte d'une agence de placement ou de soins, et 4600 dans des pharmacies, des cliniques privées ou des entreprises, ou encore sont travailleuses autonomes.

 

«La profession est diversifiée dans les hôpitaux. Elle offre aux infirmières de travailler dans le champ de leur choix, que ce soit en pédiatrie ou aux urgences. Le problème n'est pas là. Le problème, c'est le système, qui est trop rigide. Il manque de flexibilité, notamment pour les jeunes mères qui ne peuvent pas faire d'heures supplémentaires.»

Mme Desrosiers estime aussi que le gouvernement a été trop tranchant envers les infirmières de plus de 55 ans qui désirent continuer de travailler à temps partiel. «Le gouvernement a dit d'accord, mais il a exigé qu'elles aient 35 ans d'ancienneté. Qu'on ne s'étonne pas, par la suite, du nombre élevé de départs à la retraite.»

Heures supplémentaires obligatoires

Les heures supplémentaires obligatoires («TSO» pour «temps supplémentaire obligatoire») et les salaires sont les deux inconvénients majeurs de la profession, concède Mme Desrosiers. «Les infirmières n'ont jamais gagné leurs négociations. On nous a imposé un décret la dernière fois. Il est clair que les jeunes infirmières qui ont vécu les dernières négociations en ont gardé un goût amer dans la bouche.»

Selon elle, il y a pourtant des solutions. Par exemple, elle estime que le Québec devrait s'inspirer des autres provinces pour valoriser le baccalauréat. «Les études universitaires devraient devenir un standard, dit-elle. Il faudrait donc faire montre de flexibilité avec les jeunes qui veulent étudier en soirée.»

Elle note enfin que certains hôpitaux ont compris le message et n'exigent pas que leurs infirmières fassent des heures supplémentaires. À ce sujet, Mme Desrosiers a fait suivre un courriel de l'une des membres de l'Ordre, ravie de travailler à l'Hôpital général de Montréal, où les heures supplémentaires sont «inacceptables» selon une infirmière en chef.

Elle termine son courriel ainsi: «C'est triste de voir que si peu d'infirmières se rassemblent pour crier haut et fort que cette pratique est en fait contre notre code de déontologie. Alors que plusieurs infirmières pensent qu'elles sont obligées de faire du TSO à cause de ce même code de déontologie.»