Pendant que l'implantation d'un programme de dépistage du cancer du côlon, promis depuis 2007, se fait toujours attendre au Québec, un sondage révèle que les Canadiens sont frileux à l'idée de se soumettre à ce test préventif.

Pourtant, les études ont démontré que la recherche de sang occulte dans les selles - le type de dépistage préventif recommandé - permettrait de réduire considérablement le nombre de décès attribuables au cancer du côlon.

 

«C'est encore la deuxième cause de mortalité par cancer et il est facile de le prévenir», explique le Dr Ramsès Wassef, chirurgien du côlon et du rectum au CHUM.

Le cancer du côlon résulte d'abord de l'apparition d'une excroissance appelée polype dans l'intestin. «Nous avons une fenêtre de cinq à huit ans avant que le polype ne devienne cancéreux. Si, dans cette fenêtre, on enlève le polype, il n'y a pas de souffrance, c'est réglé et ça sauve des vies», ajoute le Dr Wassef.

Chaque année, 21 000 personnes reçoivent un diagnostic de cancer du côlon au Canada, dont 5800 au Québec. Quelque 9100 Canadiens en meurent, dont 2100 Québécois. Même si le cancer du côlon est l'un des rares cancers qu'il est possible de détecter de façon précoce, le Québec tarde à mettre en place un programme de dépistage, déplorent plusieurs médecins.

L'ancien ministre de la Santé, Philippe Couillard, l'avait pourtant promis à l'automne 2007 et son successeur, Yves Bolduc, a réitéré cette promesse en 2009. «Malheureusement, on n'a encore rien annoncé», déplore le Dr Gilles Primeau, conseiller scientifique à la Société canadienne du cancer.

Et pourtant, les preuves sont faites, dit-il: «On a de bonnes preuves selon lesquelles ça pourrait diminuer de 17% la mortalité si 70% des Québécois âgés de 50 à 74 ans participaient à un tel programme.»

Que les experts cessent de discuter et qu'ils passent à l'action, presse le Dr Pierre Audet-Lapointe, porte-parole de la coalition Priorité cancer. «C'est une question de priorité et d'organisation.»

Convaincre la population

Les travaux avancent, répond Karine Rivard, l'attachée de presse du ministre Bolduc. «Nous avons toujours la volonté d'aller de l'avant.» Des projets-pilotes devraient être mis en place au cours de l'année.

Mais au-delà de l'implantation d'un programme, il faudra aussi convaincre la population de l'importance du dépistage. Une enquête menée par la firme Ipsos Reid auprès de 3153 Canadiens âgés de 45 à 74 ans le démontre bien.

Commandé par le Réseau national de dépistage du cancer colorectal, du Partenariat canadien contre le cancer, le sondage dévoilé hier révèle que 56% des répondants n'ont pas passé de test de dépistage du cancer du côlon et que 60% ne saisissent pas l'importance d'en passer un avant d'avoir des symptômes.

Pourtant, la majorité d'entre eux reconnaît les bénéfices des tests de dépistage, analyse le Dr Louis Dionne, chirurgien-oncologue à Québec et cofondateur de la maison Michel Sarrazin. «Les raisons qui expliquent ces réactions sont certainement la vie trépidante que l'on mène et le fait que, quand on n'a pas de symptômes, on croit qu'on est en bonne santé.»

Il faudra redoubler d'efforts pour rappeler aux médecins l'importance de parler du cancer du côlon avec leurs patients afin qu'ils soient sensibilisés à l'importance des tests de dépistage, croit le Dr Dionne.