Le prochain rapport du vérificateur général du Québec ne sera pas tendre à l'égard du processus qui a fait pencher la balance en faveur du partenariat avec le secteur privé pour la construction des deux hôpitaux universitaires, le CHUM et le CUSM, selon ce qu'a appris La Presse.

Québec se serait ainsi engagé dans une voie incertaine en s'appuyant sur des évaluations biaisées de l'Agence des partenariats public-privé (PPP).

 

Le texte d'une cinquantaine de pages, dont La Presse a été informée, pourrait encore être modifié avant son dépôt à l'Assemblée nationale, la semaine prochaine probablement. Le vérificateur général, Renaud Lachance, estime pour l'essentiel que l'Agence des PPP a manqué de rigueur en conseillant à Québec d'aller dans cette direction. On suggère aussi que les professionnels du secteur privé de Montréal (ingénieurs, architectes et conseillers financiers) n'ont pas osé se mettre à dos le gouvernement du Québec en critiquant publiquement ce choix.

La sortie du vérificateur sera un autre coup dur pour le CHUM, qui accumule les retards et dont la première pelletée de terre ne pourra avoir lieu avant 2011. Le gouvernement Charest a récemment réitéré aux consortiums qui ont soumissionné son intention d'aller de l'avant en PPP. Mais depuis le départ de Monique Jérôme-Forget, en avril dernier, toute la stratégie des PPP est en déroute à Québec. Le président de l'Agence, Pierre Lefebvre, a été mis sur une voie de garage au Conseil du Trésor. Un fonctionnaire, Normand Bergeron, a pris les rênes de l'organisme, devenu «Infrastructure Québec», dont le rôle n'est plus que «d'accompagner» les ministères dans leurs projets de construction.

Le vérificateur s'est donné le mandat de garder l'oeil ouvert sur les hôpitaux universitaires de Montréal - une vérification continue dont il fait part des progrès dans chacun de ses rapports. Selon l'information qui filtre, le rapport sera rendu public la semaine prochaine.

On ne s'en prend pas nommément au président de l'Agence, Pierre Lefebvre, pas plus qu'au président du conseil, Pierre Lortie. Le vérificateur général estime toutefois que les dés étaient pipés lorsque Québec a opté pour le PPP dans le projet du CHUM.

En évaluant les coûts du mode de construction habituel, l'Agence a, selon le vérificateur, inclus beaucoup trop de risques, ce qui a fait gonfler les coûts. Les économies prévues par l'Agence si l'on recourait au PPP ne tiennent pas davantage la route, croit le vérificateur.

L'Agence a fait ce qu'elle souhaitait faire et, ignorant les ministères - la Santé et le Trésor -, elle aurait ainsi répondu à la commande du gouvernement, qui favorisait les PPP. Le vérificateur ne peut pas dire que le recours au PPP n'était pas justifié, mais l'étude du dossier ne révèle pas, selon lui, qu'il était avantageux.

Pour le vérificateur, l'Agence des PPP a choisi de ne pas étudier toutes les hypothèses, surtout celles qui auraient pu nuire à une décision favorable aux partenariats public-privé. L'Agence a insisté sur les risques que comporte le déficit d'entretien de tels immeubles. Selon le vérificateur, la loi fixe à 2% les coûts d'entretien. L'Agence considérait toutefois que cette balise, peut-être valable pour une route, ne convenait pas à un immeuble à la fine pointe de la technologie.